Célébrons notre histoire

Célébrons notre histoire

Rite d’accueil : Les trois fondatrices Monique, Louise, Marie-Andrée accueillent les participantes en leur remettant une gerbe fleurie.

Chacune prend place dans un grand cercle
Après le récit des fondatrices (vendredi soir), c’est au tour des groupes constitutifs de la collective à entrer en scène.

Chaque groupe expose, à sa façon, l’originalité de sa participation à la vitalité de la collective.

1. Déborah
Depuis 1997, une cellule de femmes chrétiennes et féministes, un collectif de réflexion de sensibilisation et de militance est présent dans l’Outaouais. Ce groupe, issu du milieu universitaire, réunit des femmes qui ont le goût de participer, de l’intérieur, à la croissance de l’Église. Impliquée dans le milieu culturel, l’équipe Déborah souhaite, en particulier, sensibiliser les gens à plus de justice et d’équité dans le milieu ecclésial.

Les objectifs de l’équipe sont de faire reconnaître l’existence à part entière des femmes au sein de l’Église et de susciter la réflexion sur leur place dans l’Église et dans la société. L’expérience spirituelle vécue au sein de l’équipe Déborah, en lien avec L’autre Parole, invite les membres qui en font partie : Diane, Denyse et Marie Marleau à grandir tout en cherchant à faire évoluer de l’intérieur, envers et malgré tout, l’attitude actuelle de l’Église.

Le symbole du groupe Déborah est le marteau, signe de justice pour les femmes.

Mais qui est Déborah ?
Déborah a exercé un impressionnant leadership politique et religieux au 12e siècle alors que le peuple d’Israël était déjà arrivé à la Terre promise. Pour nous situer dans l’histoire, disons qu’à cette époque, Israël est administré par treize juges qui se succèdent durant environ 400 ans. Déborah est la quatrième juge de cette lignée qui n’est pas héréditaire. Elle sera d’ailleurs la seule femme de l’histoire biblique à devenir juge. On venait régulièrement consulter Déborah, sous un palmier, pour lui présenter ses problèmes et demander justice. Sa fonction de juge avait quelque chose de sacré puisque, comme les prêtres, Déborah rappelait la Loi et le Droit. Les Juges pouvaient même être appelés Élohim – un des noms de Dieu. En plus d’être la seule femme juge, Déborah est aussi la seule juge prophétesse en Israël. Elle agit sous l’inspiration de Dieu. Quand elle convoque le commandant Barak pour qu’il dirige une armée contre les puissants ennemis cananéens, c’est au nom de Dieu. Mais Barak refuse à moins que Déborah ne l’accompagne. Ce qu’elle fera. Elle lui prédit alors que c’est par une femme que s’accomplira la victoire.

La bataille a lieu et se termine par une inondation qui met l’adversaire défait en déroute. L’ennemi se sauve y compris leur chef Sisera qui trouve refuge chez l’épouse d’un ami. Durant la nuit, cette dame du nom de Yaël va le tuer. C’est donc une victoire éclatante et complète pour Israël qui connaîtra plusieurs années de paix.

Déborah entonne alors le chant de victoire d’Israël, chant qui a été transmis oralement pendant deux siècles, jusqu’à l’apparition des scribes. C’est un des plus vieux textes bibliques, un poème, qui a souvent été chanté dans les fêtes religieuses ou lors de veillées.
Mais cessons ce discours. Voici Déborah.
Déborah se présente dans sa tenue déjuge :
Bonjour !
Aujourd’hui, on est venu me consulter pour que je donne mon avis sur la culpabilité d’une femme. J’exercerai donc bien humblement mes fonctions de juge pour éclairer la situation. Et peut-être m’aiderez-vous à formuler le jugement qui convient.

La juge Déborah : Qu’on fasse entrer l’accusée.
L’accusée entre. ( Coup de marteau de la juge)
La juge : Quel est votre nom ?
L’accusée : Eve
Juge : Vous êtes originaire de quel endroit ?
Eve : Du paradis terrestre, en Éden.
Juge : Quelle est votre fonction ?
Eve : Je suis la mère des vivants.
Juge : De quoi êtes-vous accusée ?
Eve : On m’accuse d’être la responsable du premier péché commis
sur la terre, celui qui a condamné toute l’humanité à la souffrance
et à la mort.
Juge : Et quel est ce péché ?
Eve : (Silence) On dit que j’ai mangé une pomme. (Silence) Et qu’à
cause de moi, tous les gens naissent avec le péché originel qui
découle de ma faute..
Juge : Une pomme ! Mais qu’est-ce qu’on vous reproche exactement ? J’ai besoin de votre aide pour y voir plus clair. Quelle est cette histoire de péché originel ?
Eve : Dieu nous avait dit de ne pas manger de fruit de l’arbre du bien et du mal. Or cet arbre c’était un pommier. Mais les pommes étaient si belles et avaient l’air si appétissantes. On a alors pensé, Adam et moi, que ça ne ferait mal à personne d’y goûter. Et puis on a cru qu’on n’avait pas besoin de Dieu, qu’on était ses égaux. Alors on a décidé de goûter au fruit de l’arbre (hésitation.) Et puis je veux ajouter que c’est Adam qui m’a indiqué quelle pomme choisir. C’est même lui qui a pris la première bouchée…
Juge : Vous parlez d’un certain Adam qui aurait agi en même temps que vous. Je constate ici que vous n’êtes donc pas la seule coupable même si vous êtes ici la seule accusée. Comment se fait-il que vous soyez seule aujourd’hui ?
Eve : C’est comme cela qu’on a écrit l’histoire. Au fond, mon péché est aussi celui d’Adam. On a voulu se prendre pour Dieu. Mais je le sais bien maintenant que nous ne sommes pas Dieu. Dans le monde où je suis, je connais Dieu d’une nouvelle façon. Oui vraiment, seul Dieu est Dieu.
Juge : Je vois qu’il s’agissait plutôt là d’une erreur de jeunesse. Et quant au péché originel, sachez que c’est un homme, saint Augustin, qui a inventé ce terme. Il doit d’ailleurs justement passer à la cour cet après-midi. Et puis, je constate que vous comprenez maintenant votre erreur. Personne ne peut se prendre pour Dieu. (Attente)
Je vais donc m’adresser aux personnes ici présentes pour avoir leur avis :
Eve est-elle la seule coupable du premier péché du monde ? Celles qui la croient coupable, levez la main. Vote
Juge : (coup de marteau)
Comme vous pouvez le constater, Eve, personne ne vous condamne en cette salle. Moi non plus je ne vous condamne pas. Comme vous avez beaucoup souffert depuis le commencement du monde de ce qu’on a pu dire de vous et des femmes, pour vous consoler, tenez, je vous offre une pomme !
Eve sort de la pièce en croquant dans sa pomme à belles dents.
Nouveau coup de marteau de la juge.
Fin de la présentation

2. Marie Guyart
Voici l’histoire de notre groupe :
1991, à Matane, trois féministes, engagées dans la pastorale et l’éducation, qui s’impliquent déjà dans le journal local, La Voix gaspésienne, par des articles pertinents, lancent une trousse sur le langage inclusif. Il s’agit de Monique Massé, Sylvie Langlois et Pauline Maheux.
1992, à Rimouski, les trois Matanaises rencontrent Monique Dumais et s’associent au groupe de Rimouski. Elles participent avec enthousiasme aux activités de la collective, ne ménageant pas les déplacements : hiver comme été. De Matane à Rimouski, elles roulent.
1995, Pauline Maheux et Monique Massé retournent à Québec, tout en demeurant rattachées au groupe de Rimouski qu’elles visitent toujours avec joie pour participer à des rencontres de travail.
1996, au colloque du 20e anniversaire au Mont Orford, des liens se tissent entre les participantes : Aliette Bouchard, Louise Courville, Madeleine Laliberté et Pauline Maheux. C’est alors qu’elles vivent l’espoir de la fondation d’un groupe de la Collective à Québec.
1997, le nouveau groupe doit se choisir un nom : celui de Marie Guyart de l’Incarnation nous apparaît tout à fait indiqué.
En effet, Marie de l’incarnation, arrivée à Québec, en 1639, est appelée ajuste titre la mère de la Nouvelle-France, la mère de la chrétienté au Canada. Son but principal se révèle l’éducation des filles, qu’elles soient de souche française ou indienne. Pour nous, Marie Guyart pourrait revendiquer, à bon droit, le titre de première féministe chrétienne en Amérique. Le baptême de notre groupe eut lieu, comme il se devait, à Québec, et comme le veut la coutume, quelques mois après sa naissance, soit le 25 février 1997 (année du 325e anniversaire de la mort de Marie de l’Incarnation). Coïncidence extraordinaire et peut-être providentielle, la célébration du baptême de notre groupe eut lieu en présence de Monique Dumais, ursuline et fondatrice de la collective L’autre Parole. Dès le début, l’esprit de Marie Guyart nous inspirait et nous habitait déjà. On a découvert très tôt que Marie de l’Incarnation, grande mystique, professait une dévotion particulière à Marie-Madeleine, la disciple bien-aimée, « l’apôtre des apôtres », et la première messagère de la résurrection. Aux pionnières, s’ajoutèrent tour à tour Marielle Laliberté et Colette Pasquis. Et nos portes demeurent ouvertes…

3. Myriam
Le groupe de L’autre Parole à Sherbrooke s’est développé à travers différentes étapes. Au cours des années 1980, il y a eu, de ma part, des tentatives de former un groupe avec des étudiantes de la Faculté de théologie. Mais les études se terminant, le groupe péréclitait. Un bonjour de novembre 1988, avec la venue de Marie Gratton, il fut décidé de former un groupe avec des femmes de Montréal qui se montraient intéressées : Yvette Laprise, Rita Hazel, Marie-Thérèse Olivier. Et s’y joignit Linda Simoneau, notre jeune, qui venait de prendre le nouveau poste de répondante à la condition des femmes de notre diocèse. Les réunions avaient lieu parfois à Montréal, parfois à Sherbrooke ou à Bromont quand Linda
eut déménagé.
Et c’était à l’intérieur d’un repas convivial que nous partagions nos expériences et réflexions. Nous nous baptisâmes alors du nom de Myriam, en mémoire d’une part, de la prophétesse, soeur de Moïse et d’Aaron, qui est reconnue avoir composé un cantique d’action de grâces, d’autre part, de Myriam allant rendre visite à sa cousine Elisabeth, et chantant le Magnificat. Et nous avons alors commencé le « journal de Myriam ».
Plus tard, d’autres femmes de Montréal se cherchant un groupe, nos compagnes retournèrent à la Ville. A ce moment, des étudiantes de la Faculté de théologie nous avaient rejointes : Claudette Lévesque, Catherine Baril, Céline Lafrenière, et aussi notre amie d’Asbestos, Eugénie Marchand.
Le groupe Myriam entreprit alors une autre étape de son histoire qui nous mena au 20e anniversaire, à Orford, au printemps 1996. À la suite de cet événement, nous rejoignirent Micheline Gagnon, Yolande Major, Lise Laroche. Plusieurs étant monoparentales, aux prises avec des problèmes de divorce, de droit de visite, nos rassemblements ont tenté d’être un lieu de soutien et de réconfort. Les mères amenant leurs enfants, nos réunions prirent un air familial.
Depuis l’année dernière, nous avons reçu de nouvelles personnes qui, au moment de la Marche des femmes, avaient fait connaissance avec L’autre Parole. Nous sommes heureuses d’accueillir Myriam Orostigui, au nom prédestiné, Jocelyne Benoit, Anne Bujold, Ginette Valcourt. Puisse ce groupe continuer de se développer dans la sororité, le soutien mutuel, et la transmission aux – et aux garçons- de L’autre Parole !
Louise Melançon
Sherbrooke

4. Phoebé
Phoebé est né du dédoublement du groupe inter-cités « Myriam » qui avait réuni, de 1988 à 1995, des femmes de Sherbrooke et de Montréal. Après la séparation, le nom de Myriam demeura attaché au groupe de Sherbrooke qui accueillait alors de nouvelles recrues.
À Montréal, un nouveau groupe allait naître. Au trio Marie-Thérèse Olivier, Rita Hazel, Yvette Laprise allaient s’adjoindre tour à tour Yveline Ghariani, Marie-France Dozois, Louise Garnier, Gisèle Ampleman, Roberta Forest, Kristiane Gagnon, Jacinthe Quévillon, Carmina Tremblay, Denise Cossette… Le nouveau groupe était en attente d’un nouveau nom. Après un bonne année de recherche et de tergiversations, le groupe opta pour le nom de Phoebé
Pourquoi Phoebé ? La collective L’autre Parole songeait alors à souligner le 20e anniversaire de son existence sous le thème : « Une Ekklèsia manifeste ». Pour s’y préparer, les groupes avaient été invités à lire et à commenter l’Essai de reconstruction des origines chrétiennes selon la théologie féministe d’Elisabeth Schussler Fiorenza : « En mémoire d’elle » (1986). Cette référence nous a mises sur la voie.
En effet, ce retour à nos racines chrétiennes, sous un nouvel éclairage, nous a fait découvrir, parmi les témoins du passé, une disciple remarquable, du nom de Phoebé, une chef de communauté dans l’Église de Cenchrées, ville portuaire aux abords de Corinthe. L’apport de Phoebé à l’Église naissante, sous le souffle de l’Esprit du Ressuscité, nous a stimulées à poursuivre, 20 siècles plus tard, la route ouverte par nos pionnières et à affirmer notre volonté de vivre aujourd’hui dans ce même courant de liberté, de spiritualité et d’engagement social.
Une autre motivation a justifié notre choix : notre milieu d’appartenance. Montréal possède de nombreuses affinités avec Corinthe. Ce sont deux cités où se côtoient toutes les ethnies, toutes les religions ; où vivent un petit nombre de riches parmi beaucoup de pauvres et d’exclus. Cette situation nous a interpellées. Quand nous nous réunissons pour partager nos expériences, notre spiritualité autour d’un repas commun, nous nous sentons en communion avec le même Esprit libérateur qui fait toute chose nouvelle aujourd’hui comme jadis.
Le dossard que nous portons rappelle notre souci d’engagement social à travers diverses implications : marche du Pain et des Rosés, vigile sur la colline parlementaire, marche mondiale des femmes, comité Simonne Monet-Chartrand, table inter-spirituelle, marche du sommet des peuples, présence à l’Assemblée nationale lors de la présentation du projet de loi pour l’élimination de la pauvreté, présentation d’une candidate au prix Idola St-Jean attribué par la Fédération des femmes du Québec (FFQ), investissement du groupe dans la production de la revue L’autre Parole. Voilà en somme ce qui fait la vie de notre groupe.
La décision de retenir le phare comme symbole est tout à fait récente. De fabrication artisanale, le phare témoigne de notre sensibilité aux choses concrètes de la vie. Sa lumière inextinguible évoque ia présence de notre Guide commun, celui qui nous rassure dans notre marche vers plus de justice sociale et plus d’humanité. Le phare, c’est aussi chacune d’entre nous en tant que membre de la collective. Dans les moments de désespérance ou de tempête qui obscurcissent le ciel intime de l’une ou de l’autre, chacune peut compter sur la lumière des autres pour retrouver le sens
du voyage.
Et maintenant, pour exprimer notre action de grâces, en ce jour de fête, nous avons choisi de vous faire entendre le « Merci à la vie » de Violeta Para, interprété en espagnol par Mercedes Sosa et que nous dédions aux membres et aux sympathisantes de L’autre

Parole d’aujourd’hui, d’hier et …de demain.
Gracias a la vida
Gracias a la vida
Que me ha dado tanto
Me diô dos iuceros
Y cuando los abro
Perfecto distinguo
Lo negro del blanco
Y en el alto cielo
Su fondo estrellado
Y en las multitudes
El hombre que yo amo
Gracias a la vida
Que me ha dado tanto
Me ha dado el sonido
Y el abecedario
Con ello, las palabras
Que pienso y declaro
Madré, amigo, hermano
Y luz alumbrando
La ruta del aima
Del que estoy llamando
Gracias a la vida
Que me ha dado tanto
Me ha dado la marcha
De mispies cansados
Con ellos anduve
Ciudades y charcos
Playasy desiertos
Merci à la vie
qui m’a tant donné
Elle m’a donné deux étoiles brillantes
et quand je les ouvre
je distingue parfaitement
le noir du blanc
et dans le firmament
son fond étoile
et dans la multitude
l’homme que j’aime
Merci à la vie
qui m’a tant donné
Elle m’a donné le son
et l’alphabet
avec ça, les mots
avec lesquels je pense et je dis
mère, ami, frère,
et lumière éclairant
le chemin de l’âme
de celui que j’appelle.
Merci à la vie
qui m’a tant donné
Elle m’a donné de marcher
avec mes pieds fatigués
Avec eux j’ai parcouru
villes et flaques d’eau
plages et déserts
Montanas y llanos
Y la casa tuya
Tu calle y tu patio.
Gracias a la vida
Que me ha dado tanto
Me diô el corazôn
Que agita su ritmo
Cuando miro el fruto
Del cerebro humano
Cuando miro el bueno
Tan lejos del malo
Cuando miro el fondo
De tus ojos claros
Gracias a la vida
Que me ha dado tanto
Me ha dado la risa
Y me ha dado el liante
Asi yo distinguo
Dicha de quebranto
Los dos materiales
Que forman mi canto
Y el canto de ustedes
Que es el mismo canto
El canto de todos
Que es mi proprio canto.
Gracias a la vida…
montagnes et plaines
et ta maison
ta rue et ta cour.
Merci à la vie
qui m’a tant donné
Elle m’a donné le coeur
dont le rythme s’agite
quand je regarde le fruit
du cerveau humain
quand je regarde le bon
si loin du méchant
quand je regarde le fond
de tes yeux clairs
Merci à la vie
qui m’a tant donné
Elle m’a donné le rire
et m’a donné des pleurs
Ainsi je distingue
la joie de la peine
les deux matériaux
qui forment mon chant
et votre chant
qui est le même chant
Le chant de tous
Qui est mon propre chant
Merci à la vie…

Traduction libre, K. Gagnon

5. Bonne nouv’ailes
La source de Bonne Nouv’ailes est dans le groupe Vasthi, dont faisaient partie Ginette Boyer, Kate Bullman et Béatrice Gothcheck. Elles ont fondé Bonne Nouv’ailes en novembre 1981. Elles ont donné au groupe un nom joyeux, qui signifie l’annonce d’un événement heureux. Elles y ont ajouté graphiquement des ailes, a-i-l-e-s, pour que les événements heureux – peut-être même célestes – s’y succèdent longtemps.
A elles, se sont jointes Louise Lebrun, Louise Gauthier, Lucie Leblanc, Christine Lemaire. Avec elles, s’inscrivirent dans notre tradition la créativité et le dynamisme ainsi que l’habitude de tisser des liens d’amitié durables. Le groupe prépare des célébrations de Noël qui ont marqué celles qui y ont assisté.
Sont venues ensuite Denise Couture, Isabelle Trépanier, Hélène Wurtel, Thérèse Hachette et Jeannine Provost. Bonne Nouv’ailes continuait d’être le groupe de la jeunesse malgré et peut-être grâce à nos membres de la jeune cinquantaine et plus. Avec Laurence Mottier, Hélène Saint-Jacques, Lily Lachance, Chantai Villeneuve, nous sommes toujours le groupe passionné, vibrant, impliqué particulièrement dans le comité de rédaction du bulletin de la collective.
Plus récemment, Marie-Josée Riendeau, Mélany Bisson, Lucie Bellemare, Michèle Boudreau, Nathalie Chamberland, Annie-Claudine Tremblay marquent l’époque de la création de la Table Féministe et Inter-spirituelle – un projet ambitieux et, à l’image de L’autre Parole, juste assez fou pour réussir. Carole Mathieu est notre membre la plus récemment arrivée mais elle n’est pas la dernière ; la place des femmes qui se joindront à nous est déjà prête.
Des fondatrices, à Vasthi, à Bonne Nouv’ailes, jusqu’à Déborah, le tissu que vous tenez signifie qu’en étant membre de L’autre Parole, nous sommes, comme dirait saint Paul, toutes membres les unes des autres.

6. Houlda : La houle du grand large
Sous la forme d’une chorégraphie avec paroles
Sur un fond de musique, évoquant les vagues puissantes du fleuve sur les battures de Sainte-Luce, les membres du groupe Houlda : Monique Dumais, Nellie LeBel, Francine Dumais, Rachel Saint-Pierre, Micheline Tremblay, Léona Deschamps, prennent place en tenant des tissus aux teintes bleues de la mer. Un texte est proclamé. Après chaque énoncé, le groupe effectue deux pas à droite, deux pas à gauche, en agitant les tissus, pour illustrer la houle, ce mouvement ondulatoire qui agite la mer.
Voici le texte présenté :
– Fidèles à la tradition de L’autre Parole, nous tentions d’explorer les « grandes mers » de la Bible lorsque, sur un lointain rivage, surgit une prophétesse jusqu’alors noyée dans le patriarcat. Notre curiosité, indéniablement guidée par le clignotement insistant du Grand Phare universel, nous invitait à jeter, là, nos amarres. Houlda – c’est le nom de la prophétesse
– nous y attendait. Voici comment Jeannine Ouellet, dans son texte, Les femmes de l’Ancien Testament, nous la présente :
– « Selon 2 Rois 22, 13, Houlda se situe dans la lignée des prophètes bibliques choisis par Yahvé pour dénoncer les fautes commises contre la Loi et pour exalter la bonne conduite de ceux qui la respectent ».
– Houlda ! Houlda ! Fascinées par la sonorité de ce nom qui s’allie si bien à la « houle » du grand large, nous nous sommes vite mises d’accord pour l’adopter. C’était en 1993.
– Source d’inspiration, modèle de compétence, Houlda, qui se situe dans un mouvement perpétuel de libération, nous aidera à réinterpréter la Parole originale en lien avec toutes les personnes animées du désir d’une constante conversion à l’Evangile.
– Avec elle, nous nous autoriserons à écarter les épaves, encore bien encombrantes, du pouvoir mâle : discours et comportements sexistes, récupération du labeur, du temps et de la réflexion des femmes ; exclusion des structures traditionnelles ; appropriation du sacré ; idéalisation (Marie) et dépréciation (Eve) de la « nature » de la femme.
– En elle, nous serons propulsées en haute mer, là où réside la vision prophétique d’une vie en communion telle que voulue par Jésus, l’ami des femmes.
Maintenant, les houldiennes rythment, d’un léger balancement sur place, quelques strophes de leur Magnificat maritime.
– Monique exulte au féminin :
Ma vie t’exalte, Seigneur
Exulte tout mon être
en ta tendresse
que la théologie féministe
m’a dispensée au féminin.
Aujourd’hui, je me révèle
et me reconnais femme.
Nellie exalte son droit au sacré :
Ma reconnaissance te magnifie, Seigneur.
Désormais tous les âges
devront dire et redire
que la Bonne Nouvelle de Pâques
fut donnée aux femmes
que l’on avait si longtemps
reconnues impropres au sanctuaire.
Francine souligne l’engagement de tant de femmes de la région :
Dieue, ton amour a veillé d’âge en âge
sur la multitude oubliée des puissants :
nos devancières de l’Est du Québec.
Oui, ta sollicitude a fait d’elles :
Toutes à haute voix :
des audacieuses,
des bâtisseuses,
des semeuses de vie,
des rassembleuses
et des artistes de ta création.
Rachel évoque l’histoire de chez nous.
Encore, tu confonds dans notre région
la puissance des légalistes
à travers les cris des personnes de la base.
Oui, à Rimouski, en Gaspésie
et aux Iles-de-la-Madeleine,
la Coalition Urgence rurale
révèle ta présence
dans les méandres de notre histoire,
ton histoire avec nous…
Micheline vante la créativité féminine.
Seigneur, tu retournes les riches
à leurs millions
et par nos mains vides,
tu fais naître :
des Maisons de femmes,
des cuisines collectives,
des comptoirs alimentaires….
pour rassasier d’un pain nouveau
la faim de nos familles et de nos enfants.
Léona rappelle nos mères de la Bible délaissées par la tradition.
Et, ta promesse faite à nos pères,
insondable mystère de la sollicitude,
tu l’as réalisée par nos mères :
Sara, Agar, Rébecca, Rachel, Léa,
mais surtout en Marie, mère de Jésus,
celle qui préfigura
notre histoire de femmes féministes et chrétiennes.
Amen.

Après le dépôt des tissus symboliques, les membres du groupe offrent aux participantes une coupe-souvenir contenant une petite pierre recueillie sur la grève et baignant dans l’eau de mer. Un symbole parlant en ce 25e anniversaire de L’autre Parole :

Comme le va-et-vient de l’eau polit la pierre, ainsi L’autre Parole devient, au cours de son histoire, un joyau pour plusieurs chrétiennes féministes du Québec.
De même, comme la solidité de la pierre n’est pas altérée par le ressac de la mer, ainsi L’autre Parole demeure une collective dynamique et audacieuse après vingt-cinq ans d’histoire malgré les vagues patriarcales.

7. Vasthi
Le premier groupe de réflexion et d’action de L’autre Parole a vu le jour à I’automnel978 et portait le nom très original de « groupe numéro 1 » ! Il a adopté, quelques années plus tard, en 1983, l’appellation Vasthi, du nom de l’épouse insoumise et répudiée du roi Assuérus dont on découvre
l’histoire au début du livre d’Esther. La liberté de cette femme, même si elle en a payé lourdement le prix, devait être pour nous une source d’inspiration.
Au fil des ans, plusieurs femmes ont participé à la vie du groupe Vasthi. Permettez-nous de rappeler leurs noms : Claire Borel, Ginette Boyer, Nicole Derome, Judith Dufour, Flore Dupriez, Hélène Gautron, Béatrice Gothscheck, Sharon Hackett, Monique Hamelin, Rita Hazel, Denyse Joubert-Nantel, Agathe Lafortune, Réjeanne Martin, Nusia Matura, Marie- Diane Rousseau, Louise Roy, Marie-Andrée Roy, Aïda Tambourgi, Yvette Teofilovic, Lyse Théberge
On se souviendra qu’à la fin des années 70, les groupes autonomes du mouvement des femmes faisaient une large place aux discussions et aux analyses du vécu des femmes, compris comme aliéné par le monde patriarcal, et s’appliquaient à initier des pratiques de changement. Dès les débuts, Vasthi fonctionne comme un groupe autonome ; nos expériences de femmes sont au coeur de discussions animées et les idées fusent pour promouvoir la transformation de notre réalité religieuse et spirituelle, tant au plan individuel que collectif. On s’applique à développer aussi bien notre capacité critique que notre créativité afin de proposer de véritables alternatives religieuses féministes.
Une série de dossiers « chauds » ont mobilisé les énergies du groupe Vasthi à ses débuts. En 1978, la demande d’injonction formulée par des groupes religieux de droite contre la pièce de théâtre Les fées ont soif de Denise Boucher, nous a amenées à nous opposer à la censure et à soutenir la célèbre auteure féministe. Nous avons alors mené ces actions solidairement avec des groupes féministes et des groupes chrétiens progressistes. Lors de la visite du pape aux État-Unis en 1979, nous avons soutenu sister Theresa Kane, une supérieure majeure qui s’était permise dans son discours devant le pontife, de questionner les positions romaines sur les femmes et qui s’était faite vertement rabrouer par ce dernier. Nous avions obtenu 491 signatures pour une lettre d’appui que nous avions fait publier dans Le Devoir. À l’hiver 1980, quelques membres de notre groupe vont collaborer avec l’équipe de rédaction de la revue féministe Des luttes et des rires de femmes pour la préparation d’une numéro sur les femmes et la religion. En décembre 1981, nous avons mené une action stratégiquement importante sur l’avortement. Le jour même où l’épiscopat québécois présentait en conférence de presse un nouveau document où il prenait officiellement position contre l’avortement, nous avons tenu une conférence de presse parallèle où nous avons présenté le point de vue des femmes. Nous avons mené cette action solidairement avec la Coordination pour l’avortement libre et gratuit, le Centre de santé des femmes du quartier, la revue La vie en rosé et la Fédération du Québec pour le planning des naissances. Jamais un groupe chrétien ne s’était auparavant affiché avec des groupes féministes pour s’opposer ouvertement à l’Église. Notre étiquette de « radicales » remonte sans doute à cet événement.
Par la suite, nous allons nous investir dans le développement de célébrations spirituelles féministes : Noël, le 8 mars , Pâques, etc. Cette période d’intense créativité nous amène à faire une relecture critique des rituels chrétiens tout en en dégageant la richesse symbolique et religieuse. Au chapitre des réalisations significatives, nos célébrations pascales publiques (il y en a eu trois) ont certainement été des moments importants pour l’affirmation et la communication de notre vision religieuse du monde. Ces célébrations pascales étaient à la fois des synthèses et des relectures féministes des jeudi et vendredi saint de même que de la nuit pascale. Elles étaient l’occasion d’exercer notre habileté et notre leadership liturgiques et de dire notre foi et notre espérance avec nos mots et nos expériences de femmes.
Depuis quelque temps déjà, nous travaillons à la mise en forme d’un ouvrage qui va réunir l’ensemble de la production de L’autre Parole en réécritures bibliques, en célébrations, en poésie spirituelle, etc. Nous espérons que nous l’aurons terminé à l’été 2002.
Mais Vasthi, qui réunit maintenant des pré-ménopausées, des ménopausées et des post- ménopausées travaille à un rythme un peu ralenti. Il faudrait sans doute que l’on fouette un peu nos énergies parce qu’il y a encore tant à dire et à faire pour contrer toutes les manifestations de sexisme et d’androcentrisme qui marquent le christianisme et transformer la réalité religieuse et spirituelle des femmes.

Rite du partage en mémoire de Jésus, par Marie-Andrée Et maintenant, pour nous inscrire dans ce qui a caractérisé notre quête et nos actions depuis 25 ans, nous vous convions au partage du pain et du vin.

Ensemble, bénissons et rompons ce pain, fruit de notre labeur, ce pain qui manque à tant de femmes et d’hommes sur la planète, ce pain qui est à même de nourrir notre espérance et notre détermination pour que nous soyons signes de paix et de justice.

Ensemble, bénissons et buvons ce vin, symbole du sang du Jésus vivant, symbole du sang versé des femmes qui meurent sous la violence patriarcale, symbole également de notre sang de femme qui coule chaque mois et qui peut donner la vie.

Rite d’envoi par Monique Damais
Que les vingt-cinq ans de L’autre Parole continuent à créer de l’émerveillement dans nos coeurs et à nous entraîner dans une grande vitalité pour les générations à venir. Amen !