DEUX FÉMINISTES CHRÉTIENNES MÉDIATISÉES DU XXe SIÈCLE Hommage aux deux Marie

DEUX FÉMINISTES CHRÉTIENNES MÉDIATISÉES DU XXe SIÈCLE Hommage aux deux Marie

Lorette Langlais*

L’hommage suivant a été présenté le 24 juin 2010, à la maison Marie-Gérin Lajoie de Montréal lors de l’inauguration de la plaque historique « Hommage à Marie Lacoste-Gérin-Lajoie et à sa fille soeur Marie Gérin-Lajoie ».

L’événement qui nous rassemble aujourd’hui rappelle l’engagement social de deux femmes qui ont marqué le Québec :

Mme Marie Lacoste-Gérin-Lajoie (1867-1945) cofondatrice de la Fédération Nationale Saint-Jean-Baptiste, à qui les Québécoises doivent l’accès à l’enseignement supérieur et au droit de vote ;

Sœur Marie Gérin-Lajoie, sa fille (1890-1971), première bachelière canadienne-française, pionnière du service social professionnel en milieu canadien français, fondatrice de l’Institut Notre-Dame-du-Bon-Conseil de Montréal.

Nous voulons rendre hommage à la mère et à la fille qui ont été toutes deux, préoccupées de justice sociale. Par l’analyse des réalités de leur milieu et la mise en place de programmes d’intervention sociale, elles ont contribué à transformer les codes et les statuts juridiques, les structures d’éducation, de communication et de travail, afin de les rendre favorables à l’épanouissement des personnes, surtout des femmes.

Marie Lacoste Gérin-Lajoie, s’est intéressée à la promotion politique et sociale des Québécoises. Consciente des problèmes sociaux, engendrés par la croissance rapide du capitalisme, elle milite au sein d’un organisme féministe anglophone de Montréal « Local Council of Women ».

En 1902, elle publie un Traité de droit usuel à l’intention des femmes et de la jeunesse catholique francophone et anglophone du Québec. En 1907, avec Caroline Béique, Marie Lacoste fonde la Fédération Nationale Saint-Jean-Baptiste (FNSJB) afin de regrouper en une fédération catholique francophone, les associations féministes du Québec. Leur devise : « Vers la justice par la charité ! »

Durant vingt ans, Marie Lacoste a présidé la FNSJB et a milité avec audace et persévérance en faveur du droit de vote des femmes québécoises. En 1920, les Canadiennes obtiennent le droit de vote au fédéral* ; en 1921, la FMSJB inscrit le suffrage provincial à son programme. En février 1922, sous la direction de Marie Lacoste, 400 Québécoises se rendent à Québec demander le droit de vote au premier ministre de l’époque, Louis Alexandre Taschereau. Lors du 5e Congrès international des Ligues Catholiques féminines à Rome en 1922, Marie Lacoste-Gérin-Lajoie présente au Saint-Père la situation du suffrage féminin au Québec ; la cause n’est pas gagnée. À travers espoirs et déceptions, elle passe le flambeau à Idola St-Jean qui fonde l’Alliance canadienne pour le vote des femmes au Québec en 1927 et à Thérèse Casgrain, fondatrice de la Ligue des droits de la femme. Les Québécoises obtiennent le droit de vote le 25 avril 1940.

L’édifice où nous sommes présentement réuni-e-s, au 853 Sherbrooke Est à Montréal, a été le siège social de la FNSJB, de 1925 à 1978. C’est ici que Marie Lacoste a initié sa fille aux luttes engagées en faveur des femmes. Marie Gérin-Lajoie, fondatrice de l’Institut Notre-Dame-du-Bon-Conseil de Montréal, y a été rédactrice en chef, durant dix ans, de la première revue féministe, tirée à 2000 exemplaires : La bonne Parole. Dans une société où prendre la parole en public était une pratique réservée aux hommes, la publication de La Bonne Parole était un geste prophétique. Des membres de l’Institut NDBC ont assuré le secrétariat de la Fédération de 1928 à 1952.

Marie Lacoste Gérin-Lajoie et sa fille ont été des pionnières par leurs interventions lucides, audacieuses et persévérantes. Elles ont modifié le cours de l’histoire au Québec par la mobilisation des ressources humaines féministes et par l’organisation d’actions concrètes centrées sur la dignité humaine et sur la place des femmes dans la société québécoise. Grâce à elles, les projets de justice sociale, d’éducation à la citoyenneté responsable ont donné aux milieux populaires, des instruments de promotion sociale et de solidarité indispensables à leur bien-être.

Merci à la Société d’histoire et de généalogie du Plateau-Mont-Royal qui a pris l’initiative de renouveler la plaque commémorative installée en 1990 pour souligner le 100e anniversaire de Marie Gérin-Lajoie, fondatrice de l’Institut Notre-Dame-du-Bon Conseil de Montréal et pionnière du service social professionnel en milieu canadien-français.

*S. Lorette Langlais, est la Supérieure générale des sœurs Notre-Dame-du-Bon-Conseil.

* En 1918, la Loi ayant pour objet de conférer le droit de vote aux femmes est adopté et en 1920, c’est la Loi des élections fédérale qui reconnaît que tous les Canadiens admissibles âgés de 21 ans, hommes ou femmes, ont le droit de voter aux élections fédérales. Source : http://www.chrc-ccdp.ca/fr/timePortals/milestones/23mile.asp