JE VOUS SALUE, MARIE

JE VOUS SALUE, MARIE

Nellie LeBel R.S.R

Ce que Marie représente pour moi

– femme

– religieuse dans une congrégation mariale

– engagée depuis huit ans dans une association de religieuses préoccupées de la promotion des femmes*

Tel est le mandat auquel j’ai accepté de répondre en quelques lignes et qui sen révèle un défi, vu la qualité des membres et des lectrices de L’autre Parole. Je ne suis ni théologienne ni chercheuse. La question m’oblige à transposer dans des termes précis la qualité de ma relation à Marie… Belle occasion de l’approfondir !

La place de Marie dans ma vie a marqué mon enfance ; ie suis issue d’une famille où la récitation quotidienne du chapelet était de rigueur, où les mois de Marie et du Rosaire m’ont permis de chanter à l’église tes louanges de la Vierge, adaptées à l’époque :

– mère de Dieu

– mère de Jésus

– ma mère

– reine à qui je donnais mon coeur

– femme immaculée dans sa conception

– bref, une femme très belle, très proche de Dieu

– une mère toute proche de moi.

Sentimentalité ? Sûrement ! Mais aussi place au mystère, à la foi toute gratuite et à la joie qu’elle suscita.

À l’heure du choix de ma vocation, ce ne fut pas le vocable de la Congrégation qui m’influença, mais la personne de Jésus. Entrer chez les Soeurs de Notre-Dame du Saint-Rosaire plutôt qu’ailleurs fut de l’ordre accidentel. Elles ont été mes éducatrices à l’École normale et leur maison-mère de Rimouski n’était qu’à cent kilomètres de chez moi. Ma dévotion à Marie devait cependant être marquée par mon choix.

Quels traits de la personne de Marie ma Congrégation m’a-t-elle présentés ? Encore là, je suis à l’école de l’Ave Maria, récité cent cinquante fois par jour, de façon solennelle.

Le rosaire était, à ce moment, l’Office des soeurs. Peu à peu, j’approfondis :

– l’Ave Maria, qui « chante la geste de Dieu réalisée en Marie » (L. Boff),

– l’Ave Maria, qui permet la contemplation des mystères de la vie de Jésus et de Marie,

– l’Ave Maria qui, tout comme la devise des armoiries « Tout à Jésus par Marie », met en lumière constante le rôle de Marie dans la Rédemption. 

L’Ave Maria, c’est le rosaire, dont on a dit qu’il est « résumé de tout l’Evangile » (Pie XII), « psautier de la Vierge » (Paul VI). Il devient pour moi lieu de l’Epiphanie de Marie.

Jusqu’où la contemplation des mystères de la vie de Jésus et de Marie m’a-t-elle amenée ?

Le projet du rosaire est que nous renouvelions le geste de Jean : « À partir de cette heure, le disciple la prit chez lui » On 19,27), dit Joseph Eyquem, o.p.

– Comment prendre Marie chez moi ?

– Comment Marie peut-elle devenir l’inspiratrice de mon être de femme ?

– Comment l’engagement à la promotion des femmes peut-il être dans la logique d’une suite de Marie ?

L’Ave Maria m’a appris la merveilleuse réalité d’une jeune femme, comblée de grâce, envahie par l’Esprit Saint en qui Dieu devient de notre chair et de notre race, par amour pour l’humanité qu’il vient sauver. Femme libre qui comprend l’enjeu du moment Marie présume de ma participation future et en prononçant son OUI éclairé, elle m’entraîne dans son aventure.

Je découvre donc en Marie la femme libre, et j’admire « le prolongement de toute la grandeur, la profondeur, la capacité d’écoute et d’accueil, d’entraide et de don de soi, que les femmes, tout au long de l’histoire, ont vécu sous la force de l’Esprit* (Leo Boff). Marie est une femme « en état de service », donc en « diaconie ». Et en cela, elle est inspiratrice pour quiconque veut être de l’Eglise et l’archétype des femmes qui mettent en service toutes les forces de libération de la vie qui les habite. Elle me dynamise !

Révélation du féminin de Dieu dans sa plénitude, Marie me permet de repenser en moi l’harmonie du masculin et du féminin et de travailler à rétablir l’harmonie homme/femme brisée par certaines déviations, culturelles et autres. Comment après elle, ne pas travailler avec enthousiasme avec les autres femmes, mes soeurs, à l’avènement de nouveaux rapports d’égalité hommes-femmes, et à l’émergence d’un monde où chaque être peut grandir librement dans sa dignité de fille ou de fils de Dieu ?

Plus j’approfondis le mystère qu’est Marie, plus je suis persuadée que chaque femme engagée pour un féminisme libérant et épanouissant me révèle une facette du visage de Marie que je n’aurai jamais fini de découvrir, tant elle m’apparaît aujourd’hui plus que jamais « bénie entre toutes les femmes » ; et plus je suis avide de communier avec toutes les femmes qui cherchent et qui disent une Parole neuve sur Dieu, sur Marie, sur la femme et sur l’homme. De l’Ave Maria au Rosaire, je ne peux que rêver maintenant de proposer Marie comme la soeur universelle de toutes mes soeurs, les femmes. 

* L’Association des religieuses pour la promotion des femmes est constituée de répondantes mandatées par l’autorité compétente de l’une ou l’autre des congrégations de femmes dont le nom figure au bottin de la Conférence Religieuse Canadienne. Le but de l’Association est de travailler, dans une perspective évangélique et selon les charismes des divers instituts, à la promotion des femmes religieuses et /ou laïques dans l’Église et dans la société.