LE PASSAGE

LE PASSAGE

Comment faire à mes filles, le passage de cette histoire du. patriarcat qui me dérange et me révolte ? Voilà I:inquiétude que je voudrais partager avec vous. Cette histoire n’est pas toujours évidente même si nous la portons dans nos gènes. Alors, voici mon parcours pour me l’approprier. Je vous livre un morceau de ma vie.

Je peux dire que je suis une » jeune » féministe ou déclarée féministe de dernière heure : À la Marche mondiale des ‘femmes, j’ai eu l’occasion de connaître le mouvement des femmes du Québec. Quand j’ai appris les revendications que portait cette marche mondiale, j’ai compris qu’elles présentent un très beau projet global de société, en plus de chercher à en finir avec la pauvreté et la violence dont souffrent les femmes d’ici comme d’ailleurs. Je suis encore emballée par ce projet qui correspond à ma soif de justice sociale dans ce monde.

Pendant mes années d’université ICI au Québec, j’étais principalement intéressée par le développement des pays du tiers monde. Je voulais tout savoir sur ce qui est à l’origine des inégalités encore persistantes malgré le progrès que connaissent aujourd’hui les sociétés des pays industrialisés. Je voulais comprendre les mécanismes de ce modèle de développement occidental qui ne permet pas à chaque pays d’exercer son autonomie. Finalement, ce que je voulais comprendre c’était la cause de la tragédie qui avait changé le cours de ma vie, celle de ma famille et de mon pays (je parle du coup d’état chilien en 1973). J’y ai appris bien de choses, mais pas beaucoup sur la place des femmes dans ce monde.

C’est avec la Marche mondiale que j’ai fini par comprendre notre monde, et surtout la réalité des femmes d’ici et d’ailleurs, la pièce manquante de ce casse-tête. Et comment rester indifférente ? J’ai décidé, entre autres, de m’inscrire comme membre de L’autre Parole.

Je n’ai pas encore fini de faire des recherches sur les femmes. Mon esprit de  » souris de bibliothèque » m’a permis de découvrir que les femmes ont été effacées de l’histoire de l’humanité. Leur apport au développement de la civilisation est non reconnu et non valorisé. Dans n’importe quel domaine, que ce soit dans les sciences, dans les lettres ou dans les arts, nous, les femmes, nous n’avons rien apporté à cette Histoire humaine.

C’est peut-être vrai quertol1s ne sommes pas à l’origine de grands monuments historiques.· comme les pyramides et les cathédrales, ni des systèmes colonial et patriarcal, ni de tours symboles de croissance économique, ni à la source de l’énergie qui propulse les fusées dans I : espace en saccageant notre environnement.

Cependant, j’aime bien reconnaître que nous sommes les mères de cette humanité. Hier, nous avions la tâche de donner la vie et de la nourrir de notre sang et de notre sein, d’une façon tout à fait naturelle, c’est-à-dire que les femmes et la nature allaient dans le même sens. Aujourd’hui, nous avons encore la tâche de faire grandir et avancer cette humanité, même si elle ne prend pas toujours la direction que nous voulons.

Maintenant, je possède plein d’arguments pour défendre la cause des femmes. J’en ai pris conscience. Mais que ce soit consciemment ou inconscient ment, nous les femmes, nous avons toujours, d’une façon ou d’une autre, à faire le passage de notre héritage à nos filles. Quand je pense à ma mère avec le recul de mon expérience, je reconnais cet héritage dans ses paroles, ses gestes, ses émotions, ses actions, ses colères, ses rages …

Finalement, ce n’est peut-être pas trop difficile de faire faire à nos filles le passage de notre héritage de femmes porteuses de l’humanité. Vous pourrez peut-être le constater en lisant dans les textes qui suivent ce qu’en disent mes propres filles.

Myriam Orostegui, Myriam