L’intrépide

L’intrépide

 

Les Assyriens ont réclamé

Du peuple juif sa soumission.

À son refus, ils l’ont traqué,

Et l’ont privé de nutrition.

 

L’eau de source aussi fut coupée,

Le siège a duré plusieurs jours.

Le peuple assoiffé a hurlé

Son mal, à son Dieu, en retour.

 

Ne pouvant plus rien endurer,

Les hommes se sont réunis

Avec le chef de la Cité :

Nous voulons nous rendre, ont-ils dit.

 

Le sort d’esclaves est préférable,

A celui de se voir mourir.

Faites ce qui est souhaitable

On veut à tout prix en finir.

 

Alors, le chef a rétorqué :

Donnons cinq jours à notre Dieu,

S’il ne fait rien pour nous sauver,

On se rendra, il vaudra mieux.

 

La nouvelle a fait son chemin,

Près du peuple juif affaibli,

Jusqu’à Judith, elle parvint

Juive et fille de Merari.

 

Elle était belle et respectée,

Car elle craignait Dieu grandement.

Depuis la mort de Manassé*,

Elle vivait bien dignement.

 

La nouvelle l’a alarmée,

Vite, elle envoya ses servantes,

Près des anciens de la Cité,

Les conviant de façon pressante.

 

Les anciens se sont réunis

Chez Judith qui, d’une voix ferme,

Aussitôt qu’ils furent assis,

Clama ses discours en ces termes :

 

Qui êtes-vous donc pour tenter

Notre Dieu qui nous a choisis ?

Comment avez-vous pu oser,

Le mettre à l’épreuve aujourd’hui

 

Est-ce à moi de vous rappeler

Combien notre peuple a souffert,

Chaque fois qu’il a oublié,

Et trahi son Dieu sur la terre ?

 

Comme vos pensées sont donc basses

Pour prétendre contraindre Dieu.

Je vais penser à votre place,

Avec l’espoir d’agir au mieux.

 

Aide-moi à te rendre gloire

En triomphant de l’ennemi.

O Dieu, ne me laisse pas choir,

Assiste-moi par ton esprit.

Sers-toi de moi comme instrument,

Pour infliger une leçon

Aux Assyriens qui aisément

T’insultent de mille façons.

 

Puis elle quitta Béthulie**,

Parle de ses plus beaux atours.

Des regards la suivaient ravis,

Ses yeux les fixaient en retour.

 

Elle arriva ainsi au camp

Des Assyriens, et réclama

De voir leur grand chef à l’instant

D’un secret, elle l’informa.

 

Elle a inventé une histoire

Pour essayer de le convaincre.

Il n’eut pas de mal à la croire

Étant habitué à vaincre.

 

Grâce à sa ruse et sa beauté,

Du grand chef elle vint à bout,

Un soir qu’il l’avait invité,

Le faisant boire coup sur coup.

 

Une fois qu’il fut endormi,

Sans hésiter, elle trancha

La tête de son ennemi,

Et chez les juifs la rapporta.

 

Ainsi Judith a pu sauver

Son peuple grâce à son courage.

Sa foi en Dieu la fit gagner,

Profitable fut son voyage.

 

Oui, une femme a triomphé

Pendant que les hommes tremblaient !

Elle eut le courage d’oser,

Dieu lui a montré qu’il l’aimait.

 

Par une femme, le Salut

Est arrivé, cette fois-là,

Le peuple entier l’a reconnu,

Et, dans une livre, le nota.

 

(Jdt ai. 1-16)

 

AÏDA TAMBOURGI, THEOLOGIENNE

* Son mari.

** Ville inconnue, donnée ici comme une position-clef commandant le passage vers la Judée. (D’après la Bible de Jérusalem)