OSAMA

OSAMA

Drame inspiré de faits réels, 2003 (Film tourné par Siddiq Barmak, afghan)

Francine Dumais, Houlda

En pays musulman intégriste, il ne fait pas bon qu’une femme, veuve de guerre par surcroît, vive sans homme dans sa demeure.

C’est le cas d’une Afghane, mère d’une fillette de 12 ans, hébergeant aussi sa propre mère. Cette jeune veuve vient de perdre son emploi à l’hôpital sous l’influence des Talibans, reléguant toutes les femmes au foyer, dans la sphère privée. Pour achever de les rendre invisibles ou sans visage, elles doivent se couvrir de la burqa dès qu’elles sortent à l’extérieur.

De plus le fait d’« être majeure et vaccinée » ne suffit pas, il faut aussi que toute femme soit accompagnée d’un mâle d’environ 12 ans et plus.

Devant cette impasse créée par des humains se croyant plus branchés sur Dieu que d’autres et pour ne pas mourir stupidement de faim, la mère a l’idée de travestir sa fille en garçon. Pour ce faire elle dut lui couper les cheveux et l’habiller avec les vêtements de son mari. Une fois raccourcis et, dans un geste symbolique, elle plante dans un pot de terre, telles des boutures, les tresses coupées. Ainsi la mère, couverte de la burqa et accompagnée de son « jeune fils », peut continuer de vaquer à ses occupations à l’extérieur.

Une autre scène m’a profondément peinée. La fillette suspendue par le haut du corps à l’intérieur d’un puits laisse entendre des pleurs lancinants à un auditoire masculin impassible ou figé par la stupeur. Le vieux mollah de l’école coranique lui a réservé ce traitement terrifiant pour la punir de sa présence à cette école où elle a été traînée de force par un recruteur avec d’autres garçons.

Enfin pour couronner cette bêtise, lors d’un procès sommaire avec d’autres hommes et femmes, elle fut remise comme épouse à ce même vieux mollah qui voulait agrémenter son ordinaire. Donc deuxième punition ! Le malheur de l’une fait le bonheur de l’autre qui ne s’est pas trop regardé dans le miroir. À l’allure qu’il a, il aurait compris le manque d’enthousiasme de la fillette.

Petit baume cependant pour la fillette : les deux premières épouses l’ont accueillie avec toute la compassion de femmes données en mariage sans leur consentement. Et c’est en mêlant leurs larmes avec celles de la fillette qu’elles l’ont parée pour la sordide nuit de noces imminente.

Sa journée de travail finie, le vieux mollah rentre tout guilleret chez lui,là où il avait auparavant déposé la petite, sans explication superflue. Sans prendre le temps de souper, il se glisse dans l’eau chaude de son bain suspendu qui ressemble plutôt à un immense chaudron de fer, sous lequel brûle un gros feu allumé par des âmes prévenantes. Et pour remercier ces âmes,c’est-à-dire ses premières épouses, il a pris soin de les cadenasser chacune dans leur chambre avec leurs enfants avant de filer sous les combles avec sa nouvelle conquête, plutôt réticente.

En voyant le vieil homme tout émoustillé plonger sous l’eau, je me suis surprise à souhaiter que le chaudron se décroche et chute dans le feu ou bien qu’un lourd couvercle retombe de lui-même sur le « chaudron-bain » pour que le vénérable mollah puisse mijoter à son aise.

Le fait que ce film ait été tourné par un homme de ce pays m’apporte un certain réconfort devant l’affligeant abus de pouvoir à l’égard des femmes.