ANNÉE LITURGIQUE FÉMINISTE

ANNÉE LITURGIQUE FÉMINISTE1

Flore Dupriez

L’année liturgique chrétienne est marquée de temps qui ont leurs cérémonies, leurs couleurs et leurs rites spécifiques. Imaginons une année liturgique féministe qui commencerait par la Chandeleur, 2 février, fête de fécondité, pour se terminer à Noël, une autre fête de fécondité.

Imaginons une année liturgique dans laquelle chaque fête retrouverait le sens qu’elle a eu à l’origine. Les rites qui la marqueraient comprendraient une couleur, des symboles inspirés par des pierres précieuses, des animaux, des mets destinés à manifester le sens que l’on désire leur donner.

La Chandeleur : fête de fécondité

La Chandeleur est la forme chrétienne qu’a prise une fête commune aux Romains et aux Celtes. Les Romains fêtaient les Lupercales, une fête de la fécondité, tandis que les Celtes fêtaient Imboic, fête du souffle vital. Sainte Brigitte, un des visages de la déesse mère celtique, est fêtée le 1er février. La Purification de Marie, le 2 février. Le 3 février, c’est saint Biaise ou le souffle froid de l’hiver, mais aussi le souffle de l’Esprit. Le 5 février, c’est sainte Agathe, la patronne des nourrices, métamorphose de la Déesse Mère sous l’aspect de Vénus.

Il s’agit donc d’une fête de fécondité, de lumière, de pureté, de beauté et même de souffle poétique.

Les rites que nous pourrions imaginer pour cette fête devraient rassembler ces aspects : la fécondité se traduirait par une gestuelle autour de la poêle à frire où l’on cuirait des crêpes, signe d’abondance ; la lumière viendrait de multiples bougies allumées. Des chants et des poèmes pourraient accompagner ces gestes. Les femmes, vêtues de couleurs lumineuses, célébreraient leur fécondité, leur lumière, leur beauté et leur souffle de vie.

Couleur de la fête  : le jaune, couleur de l’éternité, de la terre fertile.

En Chine, pour assurer la fertilité du couple, mettre le yin et le yang en harmonie, les vêtements des mariés et la couche nuptiale sont de couleur jaune.

Pierre symbolique : l’ambre.

L’ambre représente le fil psychique reliant l’énergie individuel à l’énergie psychique ; l’âme individuelle à l’âme universelle. Il symbolise l’attraction solaire, spirituelle et divine. Un visage d’ambre est souvent attribué aux saintes et aux saints. Il signifie qu’il y a un reflet du ciel en eux.

L’objet du jour  : la poêle à frire, instrument que nous utilisons toutes et qui nous permet d’exploiter nos fécondités culinaires et de les partager pour notre joie et celle des autres.

L’animal symbolique : le lièvre ou le lapin.

Ces animaux sont liés à la Terre-Mère et à tout son symbolisme fécondant. De plus, lièvres et lapins sont des animaux lunaires, donc de connivence avec les femmes.

Le mets à l’honneur  : les crêpes, faites de farine de blé et flambées. Le blé, nourriture essentielle et primordiale, est un cadeau de la Déesse. Il symbolise le don de la vie qui ne peut être qu’un don de la Divinité.

Méditations suggérées : Jean 12, 23-25

« La voici venue l’heure

où le Fils de l’Homme doit être glorifié.

En vérité, en vérité je vous le dis,

si le grain de blé ne tombe en terre et ne meurt,

il reste seul.

S’il meurt,

il porte beaucoup de fruits.

Qui aime sa vie la perd

et qui hait sa vie en ce monde

la conservera en vie éternelle. »

7e Béatitude, L’autre Parole2

« Bienheureuses celles qui travaillent à pétrir

le pain de l’autonomie ;

de l’égalité,

de la solidarité.

Ensemble, elles nourriront la terre.

Malheureuses celles qui sont facilement rassasiées

des miettes qui tombent de la table sacrée.

Elles paralysent la croissance de l’Église. »

Le 8 mars : fête d’espérance

Après la Chandeleur, nous fêtons le 8 mars, la Journée internationale des femmes. Il s’agit d’une fête de création plus récente et d’origine laïque. Cette fête est devenue tradition dans L’autre Parole qui regroupe des femmes féministes et chrétiennes qui font mémoire, à cette occasion, des luttes et des oppressions de toutes les femmes. Cette fête survient lorsque l’hiver tire à sa fin et que l’espoir d’un printemps renaît.

Les rites de cette fête sont d’abord des rites de purification, puis de partage : partage de nos réflexions et partage d’un repas. Vêtues de longues tuniques de couleur pâle, nous chaussons des souliers neufs pour fêter le retour du printemps et mieux marcher dans les chemins qui s’ouvrent à nous.

Couleur de la fête : le rouge.

Le rouge est la couleur du feu, du principe de vie, la couleur du sang. Le rouge vif et tonique invite à l’action ; le rouge sombre, nocturne représente les mystères de la vie. Cette couleur convient bien à la fête que nous célébrons : fête d’action et de détermination mais aussi fête des femmes et donc des mystères de la vie.

Rites : à partir de l’eau.

L’eau que nous versons sur nos mains est un rite de purification. Elle sert à l’engagement des initiés qui demandent à la Divinité, mère et matrice, d’effacer les ancienne devient femme nouvelle. L’eau a un pouvoir sotériologique et régénérateur qui permet une renaissance.

Les rites de l’eau : la lessive, le bain, les ablutions avant une cérémonie ne devraient pas être dissociés dans notre vie. Nous sommes capables de voir une unité dans tous ces gestes où intervient l’eau purificatrice mais aussi fécondante.

D’ailleurs les poètes l’ont bien compris puisqu’ils ont chanté le pouvoir maternel, sensuel et féminin de l’eau.

Célébrons les vertus de l’eau.

La pluie du printemps a lavé la neige sale et l’herbe verte qui apparaît nous dit que la vie reprend.

Nous sommes l’eau pure, maternelle, désaltérante, maîtresse de vie et de progrès. Célébrons l’eau avec des gestes qui traduisent notre connivence :

Prions en bénissant avec de l’eau :

Eau, source de vie

Eau, source de purification

Eau, source de régénérescence

Eau, masse indifférenciée, vous contenez tout le possible féminin, tout le virtuel, tous les germes.

Que ces ablutions que nous faisons avec le Christ, source de toute vie, nous permettent de retourner à notre source, mais aussi de retrouver des forces nouvelles et qu’un jour elles nous fassent participer à la résurrection.

Le Christ est le maître de l’eau. N’a-t-il pas dit à la Samaritaine, après lui avoir demandé à boire :

« Si tu savais le don de la Divinité

et qui est celui qui te dit :

donne-moi à boire,

c’est toi qui l’aurais prié

et il fautait donné de l’eau de vie. »

(…)

Elle lui demande encore d’où il tient l’eau de vie

et le Christ lui répond :

« Quiconque boit de cette eau

aura soif à nouveau

mais qui boira de l’eau que je lui donnerai

n’aura plus jamais soif,

l’eau que je lui donnerai

deviendra en lui source

d’eau jaillissant en vie étemelle. » (Jn 4,10-11,13)

Pierre symbolique : la perle.

Dans cette fête du 8 mars, notre quête sera symbolisée par la perle liée à l’eau et à la femme. Elle représente le principe féminin, le Yin, et est le symbole essentiel de la féminité créatrice.

La perle a des propriétés médicinales, aphrodisiaques, fécondantes. Chez les Grecs, elle est l’emblème de l’amour et du mariage. Les chrétiens et les gnostiques lui garderont sa symbolique et même l’enrichiront. La quête de la perle va symboliser le drame spirituel de la chute de l’humanité et de son salut. Elle est image de transfiguration et traduit notre recherche du féminin restauré dans sa pleine signification, c’est-à-dire : origine de la vie, pureté, sagesse, grâce et vertu.

Objet du jour : l’ancre.

L’ancre est un symbole de fermeté et de solidité. Elle symbolise le côté calme et lucide de notre personnalité dans les situations tumultueuses et agressantes de la vie. Songeons aux femmes battues, violées, méprisées, sans emploi, sous-payées, mais gardons l’espérance que tout cela peut changer par notre vigilance et notre action.

L’ancre symbolise aussi le conflit entamé par les femmes pour qu’on leur face justice. Elles ont le pouvoir d’arrêter le mouvement de la vie lorsque les circonstances ne leur permettent pas de réaliser toutes leurs fécondités.

L’animal symbolique : la grenouille.

La grenouille, dont le chant s’élève lorsque la terre reverdit, va symboliser ce grand moment de la journée des femmes. Les grenouilles sont les chantres de la Terre-Mère. Elles manifestent bruyamment que le renouveau s’accomplit et que la nature se réveille.

Le mets à l’honneur : l’eau d’érable.

L’eau et la sève de l’érable, tout ce qui a été fait avec cette première sève qui monte dans les arbres et symbolise notre vie, notre joie et devient source d’énergie.

Méditations suggérées :

Jean 2,1-12

Aux noces de Cana, sa mère lui ayant fait remarquer que leurs hôtes n’avaient plus de vin, le Christ changea en vin l’eau destinée aux rites des Juifs. Ne pouvons-nous pas trouver là une symbolique appropriée à la fête du 8 mars. Les eaux calmes sont transformées en vin, symbole à la fois de colère mais aussi promesse d’immortalité.

Hébreux 6, 19-20

Paul exhorte ses lecteurs à croire à la rédemption du Christ, à sa justice et à l’espérance qu’il nous a apportée :

« En elle, nous avons comme une ancre dans notre âme, sûre autant que solide et pénétrant par-delà le voile, là où est entré pour nous en précurseur, Jésus… »

Luc 7, 44

Le Christ dit à un pharisien : « Et se tournant vers la femme. Tu vois cette femme ? dit-il à Simon. Je suis entré dans ta maison et tu ne m’as pas versé d’eau sur les pieds ; elle, au contraire, m’a arrosé les pieds avec ses larmes et les a essuyés avec ses cheveux. Tu ne m’as pas donné de baiser, elle, au contraire, depuis que je suis entré, n’a pas cessé de me couvrir les pieds de baisers. Tu n’as pas répandu d’huile sur ma tête, elle, au contraire, a répandu du parfum sur mes pieds. À cause de cela, je te le dis, ses péchés, ses nombreux péchés, lui sont remis parce qu’elle a montré beaucoup d’amour. Mais celui à qui on remet peu montre peu d’amour. »

1ère Béatitude, L’autre Parole

« Heureuses sont celles dont le coeur n’est pas endurci, car elles restent à l’écoute des femmes et de Dieu

Malheureux ceux et celles qui associent et perpétuent la pauvreté des femmes car ils trahissent Dieu :

– en ne reconnaissant pas officiellement la valeur sociale et économique du travail domestique ;

– en refusant dans l’Église catholique le sacerdoce aux femmes parce que femmes ;

– en gardant les femmes hors des lieux où se fabriquent les valeurs qui régissent leur vie. »

Pâques : Victoire de la vie sur la mort

Pâques était déjà une fête importante pour les Juifs qui commémoraient alors la sortie d’Égypte, sous la conduite de Moïse et de Myriam. Pour l’Église d’Orient, c’est la fête qui est préparée par toute l’année liturgique. Elle annonce la seconde venue du Christ. Pâques est aussi considéré comme la plus grande fête chrétienne : celle de la victoire de la vie sur la mort.

La fixation de la date de Pâque a été un long sujet de controverses. Au début du christianisme, elle coïncidait avec la Pâques juive et l’immolation de l’agneau pascal symbolisait le sacrifice de Jésus. Au VIe siècle, la date de Pâques fut fixée au dernier dimanche suivant la première pleine lune après l’équinoxe du printemps.

Pâques est donc une fête du printemps reliée aussi à la lune, astre qui connaît des phases comme celles de la vie humaine. Elle croît, décroît et disparaît, mais cette « mort » est suivie d’une renaissance qui est la nouvelle lune. C’est l’astre de l’éternel retour et l’astre des rythmes de la vie.

Les femmes ont beaucoup d’affinités avec la lune, non seulement sur le plan physique, mais aussi dans leurs rapports avec le sacré. La lune « n’a jamais été adorée pour elle-même, mais en ce qu’elle révélait de sacré »3. La femme a été révélatrice du sacré, objet du sacré, mais n’est pas encore sujet du sacré.

La lune est aussi liée au cycle de la végétation, à la pluie, à l’agriculture, à la régénération et à l’immortalité.

La résurrection du Christ qui s’inscrit dans le cycle lunaire est donc une fêle dont la symbolique est très parlante pour les femmes. En effet, Jésus Dieu est la Lune. Il reçoit ou ne reçoit pas la lumière du Soleil qui symboliquement représente l’énergie cosmique. Les deux nuits que Jésus passe dans l’autre monde ne permettent pas qu’on donne de lui une interprétation de type solaire, il a des connivences avec la lune qui disparaît et réapparaît4.

Les rites de cette fête vont donc rappeler la victoire de la vie sur la mort. Ce sont aussi des rites d’initiation. Il n’y a pas d’initiation sans période de réflexion. H faut des gestes qui nous feraient passer à l’état de « femme nouvelle ».

Voici des rites qui pourraient signifier le passage des ténèbres à la lumière, de la tristesse à la joie.

Des femmes dans l’obscurité, une mélopée triste s’élève, puis doucement, une, puis deux, trois, dix lumières s’allument et le murmure triste devient un chant de joie. Le voile noir qui couvrait leur visage est remplacé par une couronne de lumière.

Toutes portent un vêtement clair, bleu de préférence. Le partage d’un repas où l’on refera le partage du pain et du vin va couronner une période de réflexion et d’échange sur un thème qui préoccupe les femmes décidées à retrouver la lumière.

La couleur du jour est le bleu, couleur du ciel infini.

C’est la plus immatérielle des couleurs. Elle nous montre le chemin de l’infini comme l’oiseau bleu conduit au bonheur. Le bleu nous fait penser à l’éternité. Il est à la fois la couleur du ciel et de la nuit.

La pierre symbolique : le diamant bleu.

C’est la pierre précieuse la plus résistante, la plus lumineuse. À Pâques, le courage triomphe de l’adversité. Le diamant symbolise la fermeté de l’âme, mais aussi la souveraineté universelle, l’incorruptibilité.

L’objet du jour : le lit.

Le lit symbolise la régénérescence dans le sommeil et dans l’amour. Le Christ est mort par amour pour nous mais il est aussi ressuscité. Le lit de la naissance, le lit conjugal, le lit funéraire. Nous trouvons le lit présidant aux grandes étapes de la vie.

Mais la symbolique du lit peut encore aller plus loin. Ainsi, lorsque le Christ a dit au paralytique de porter son lit, il lui signifiait en fait d’utiliser sa vie, son corps pour vivre selon le Christ. Il avait reçu la grâce et pouvait désormais agir, restauré par elle.

L’animal symbolique : l’hirondelle.

Les hirondelles sont les messagères du printemps. Le jour de leur retour coïncide avec l’équinoxe du printemps. En Chine, ce jour était l’occasion de rites de fécondité. On a cru aussi que le rythme saisonnier des migrations des hirondelles s’accompagnait d’une métamorphose. En hiver, l’hirondelle se réfugie dans l’eau où elle devient coquillage. Puis la belle saison revenue, elle redevient hirondelle en accompagnant le soleil qui monte à l’horizon. L’hirondelle symbolise l’éternel retour et annonce la résurrection.

N’est-ce pas une symbolique très parlante pour les femmes et qui convient bien à la fête célébrée ?

Le mets à l’honneur : l’oeuf.

La naissance du monde à partir d’un oeuf est une idée que l’on retrouve dans presque toutes les civilisations du monde avec des variantes dans les processus de manifestation.

L’oeuf contiendrait en puissance la multiplicité des êtres. Les Égyptiens, par exemple, croyaient que l’eau primordiale était sortie d’un oeuf (mot féminin en égyptien) dont avait jailli un dieu qui par la suite avait organisé le monde. L’œuf apparaît aussi comme un symbole de renaissance, de rénovation périodique de la nature. Il est l’emblème de l’immortalité et symbolise la résurrection. L’oeuf enfin évoque le nid, le cocon dont nous avons à sortir pour prendre notre envol. Les femmes se doivent de remettre en question tout ce qui les enferme dans une coquille, pour courir le risque d’êtres libres. Ceci n’interdit pas de couver les œufs d’où sortiront la liberté et la justice, les forces du renouveau.

Méditations suggérées :

Marc 16,1-7

« En ce temps-là, sitôt terminé le repos du sabbat, au coucher du soleil, Marie-Madeleine, Marie, mère de Jacques et Salomé achetèrent des parfums pour embaumer le corps de Jésus. Et de grand matin, le premier jour de la semaine, (le dimanche), elles se rendirent au tombeau dès le lever du soleil. Elles se demandaient : « Qui nous roulera la pierre pour dégager l’entrée du tombeau ? » Mais au premier regard, elles virent que la pierre, qui était énorme, avait été roulée sur le côté. Pénétrant dans le tombeau, elles virent un jeune homme vêtu d’une robe blanche, assis du côté droit ; la frayeur les saisit. Mais il leur dit : « Ne vous effrayez point. Vous cherchez Jésus de Nazareth, le crucifié, il est ressuscité, il n’est plus ici. Voici l’endroit où il fut déposé. Allez donc annoncer à ses disciples, et spécialement à Pierre, qu’il vous précédera en Galilée. C’est là que vous le verrez, comme il vous l’a dit ».

I Cor. 5,7-8

« Qu’il n’y ait plus de trace en vous du vieux ferment ! Soyez une pâte toute nouvelle, pour être aussi (comme au repas de Pâques) du pain sans levain. Car notre Agneau pascal a été immolé et c’est le Christ.

Festoyons donc, non pas avec le vieux ferment — celui de la malice et de la perversité — mais avec des pains sans levain de la droiture et de la vérité.

8e Béatitude, L’autre Parole

Heureuses celles qui crient

qui rauquent et qui rockent

pour déchirer le silence de la mort.

Malheureux ceux et celles qui ont le pouvoir

d’endormir les cris.

Malheureuses celles qui chignent et qui grognent

sans toucher le coeur des oppressions. »

Solstice d’été : fête de fertilité

Au mois de juin, lorsqu’il commence à faire chaud , les Québécois fêtent avec des danses, des chants, des repas, des cortèges la Saint-Jean-Baptiste. Il s’agit de la commémoration de la naissance de ce saint et non pas de sa décapitation dont la symbolique serait fort différente.

Jean-Baptiste est né au solstice d’été tandis que le Christ naîtra au solstice d’hiver. Rappelons le texte de Jean 3, 30 : « II faut que lui grandisse et que moi, je décroisse ». Jean-Baptiste est le précurseur, il est né d’une femme que l’on croyait stérile, Elisabeth, et qui était déjà avancée en âge. Zacharie, sceptique devant l’annonce de l’Ange Gabriel, fut réduit au silence jusqu’à la naissance de Jean- Baptiste. Il recouvrit l’usage de la parole lorsqu’on lui demanda le nom de son enfant.

Jean, écrivit-il, et non pas Zacharie comme l’aurait voulu la coutume :

« Et toi, petit enfant,

tu seras prophète du Très-Haut ;

Car tu marcheras devant le Seigneur,

pour lui préparer les voies,

pour donner à son peuple la connaissance du salut

par la rémission de ses péchés ;

grâce aux sentiments de miséricorde de la Divinité,

dans lesquels nous a visités l’Astre d’en-haut,

pour illuminer ceux qui demeurent dans les ténèbres et

l’ombre de la mort,

afin de guider nos pas

dans le chemin de la paix ». (Luc 1, 73-79)

Zacharie n’a pas cru que sa femme stérile pouvait enfanter mais Elisabeth a accepté cette fécondité inespérée. Rien n’est impossible aux femmes.

Dans les civilisations agraires, lorsque le sol était nettoyé et préparé, le bêchage et les semailles étaient réservés aux femmes qui, habituées à concevoir les enfants, étaient qualifiées pour rendre la terre féconde.

Or Elisabeth va accepter sa grossesse sans discussion : « Voilà ce qu’il a fait pour moi le Seigneur, au temps où ï lui a plu d’enlever mon opprobre parmi les hommes ». (Luc 1, 23)

Elisabeth est donc devenue féconde et son fils naîtra au solstice d’été lorsque « l’astre », le soleil, est le plus haut dans le ciel. Le 24 juin est donc une autre fête de fécondité. Même celles qui se croyaient stériles peuvent porter des fruits à condition de faire confiance à la vie et de garder l’espérance.

Les rites de ce 24 juin pourraient être des réjouissances ( chants, danses, gestuelles qui miment l’ensemencement…) qui célébreraient le début des temps chauds qui vont permettre à la terre de porter des fruits. Il pourrait y avoir aussi un partage des premières pousses

Nous pourrions méditer sur l’espérance et la foi que doivent avoir toutes celles qui confient une graine à la terre. Cette même foi et cette même espérance sont nécessaires aussi pour entreprendre tout projet, quelle que soit sa nature.

La couleur du jour : le vert.

Le vert est la couleur du règne végétal qui revit et la couleur de l’eau. H signifie l’espérance, la montée de la vie, la longévité et même l’immortalité. La vie naît dans le rouge mais s’épanouit dans le vert.

La pierre symbolique : le rubis.

Le rubis, de couleur grenat luminescent, symbolise l’objet de la quête des femmes lors de cette fête. Il est censé briller dans les ténèbres et donc traduit l’espérance que nous mettons dans la graine confiée à la terre nourricière. Le rubis était considéré dans l’Antiquité comme l’emblème du bonheur. Or, le bonheur ne vient-il pas de toutes les fécondités qu’elles soient physiques, psychiques, matérielles ou spirituelles ?

L’objet du jour : un pot à fleurs.

Le pot est un symbole aquatique. En Inde, la déesse elle-même était représentée sous cette forme. L’eau qu’il peut contenir le lie à la fécondité. Nous pouvons l’utiliser soit comme récipient pour l’eau, soit pour y mettre de la terre dans laquelle germeront des semences et grandiront les fleurs ou les herbes.

L’animal symbolique : le saumon.

Le saumon est, comme le sanglier, l’animal de la science sacrée. Chez les Celtes, le saumon est un des symboles, de la sagesse et de la nourriture spirituelle. La forme du saumon serait la dernière forme adoptée dans le phénomène de la métempsychose.

Le mets à l’honneur  : dégustation d’herbes.

Les herbes symbolisent tout ce qui soigne et redonne la vie. Elles sont excellentes pour la santé, la virilité et la fécondité. Les divinités fondatrices ont été saluées dans les herbes qui facilitent l’accouchement, l’accroissement, le pouvoir génétique ; elles assurent la fertilité et la richesse. Donc, coupons des herbes, mangeons des herbes. Nous accroîtrons notre pouvoir créateur. Les rites de ce jour tiendrons compte du partage des herbes. Une gestuelle pourrait évoquer les effets des herbes sur nos corps comme des paroles sur notre pouvoir créateur.

Méditations suggérées :

Genèse 1,11 :

« La Divinité dit : « Que la terre verdisse de verdure : des herbes portant semence et des arbres fruitiers donnant sur la terre selon leur espèce des fruits contenant leur semence » et il en fut ainsi. La terre produisit de la verdure, des herbes portant semence selon leur espèce, des arbres donnant selon leur espèce des fruits contenant leur semence, et la Divinité vit que cela était bon ».

Marc 4, 26-28 :

« Et il disait : II en est du royaume de la Divinité comme d’une femme qui aurait jeté du grain en terre : qu’elle dorme ou qu’elle se lève nuit et jour, la semence germe et pousse, elle ne sait comment. D’elle-même, la terre produit d’abord l’herbe, puis l’épi, puis plein de blé dans l’épi. Et quand le fruit s’y prête, elle y met la faucille parce que la moisson est à point ».

Romains 8, 13-25 :

« J’estime en effet que les souffrances du temps présent ne sont pas à comparer à la gloire qui doit se révéler en nous. Car la création en attente aspire à la révélation du fils de la Divinité : si elle est assujettie à la vanité… c’est avec l’espérance d’être elle aussi libérée de la servitude de la corruption pour entrer dans la liberté de la gloire des enfants de la Divinité. Nous le savons en effet : toute création jusqu’à ce jour gémit en travail d’enfantement. Et non pas elle seule : nous-mêmes qui possédons les prémices de l’Esprit, nous gémissons aussi intérieurement dans l’attente de la rédemption de notre corps. Car notre salut est objet d’espérance ; et voir ce qu’on espère, ce n’est plus l’espérer : ce qu’on voit, comment pourrait-on l’espérer encore ? Mais espérer ce que nous ne voyons pas, c’est l’attendre avec constance ».

5e Béatitude, L’autre Parole

« Heureuses vous les femmes bafouées à cause de vos prises de parole

Par votre ténacité, la libération se construit.

Malheureuses serez-vous lorsque vous vous

laisserez séduire par un discours

qui vous dépossédera du sens de votre lutte ».

L’Assomption : Réconciliation du corps et de l’esprit

15 août : Assomption de la Vierge Marie.

La virginité a été valorisée, voir imposée par l’Église, mais la virginité, la continence étaient déjà connues et mises en pratique dans le culte à la Déesse-Mère. Ce n’était pas alors dans le cadre d’une morale répressive de contrôle du corps des femmes par une autorité mâle, mais parce que ces réserves d’énergie pouvaient donner par la suite plus de force vitale.

La fête de l’Assomption se situe peu avant que l’année zodiacale entre dans le signe de la Vierge avec lequel nous arrivons au terme du cycle annuel de l’élément Terre.

Les évangiles apocryphes cités par la légende dorée racontent que lorsque l’archange Gabriel présenta l’âme de Marie devant le Christ, celui-ci lui parla ainsi : « Levez-vous, ma mère, ma colombe, tabernacle de gloire, vase de vie, temple céleste, et de même que, lors de ma conception, vous n’avez pas été souillée par la tache du crime, de même dans le sépulcre, vous ne subirez aucune dissolution du corps ».

Ce texte est un mélange de symbolique tiré de la Déesse-Mère pour le début, mais, par la suite, de l’héritage manichéen de la lutte entre le Bien et le Mal, l’esprit et la matière. Or notre but, à nous, femmes de cette fin du XXe siècle, est de rétablir l’unité du corps et de l’esprit sans les opposer. Marie montant au ciel avec son corps symbolise cette réconciliation de la chair et de l’esprit.

« Elle monte au ciel

La Vierge Mère

La Vierge de Jessé

C’est avec son corps

Et pour l’éternité

Qu’elle s’élève jusqu’à celui qui est »5.

La couleur du jour : l’orange.

Cette couleur symbolise le point d’équilibre entre l’esprit et la libido. C’est la couleur des vêtements des moines bouddhiques. Les fiancées romaines portaient un voile orange le jour de leur mariage. C’est donc une couleur de sagesse et d’équilibre qui concorde bien avec l’esprit de cette fête où l’on célèbre la réconciliation du corps et de l’esprit. Celle-ci avait déjà existé au paléolithique lorsque « au pouvoir physique et métaphysique du chasseur correspondait symétriquement le pouvoir procréateur de la femme »6.

La matière précieuse symbolique : l’or.

L’or est censé naître de la terre. Les alchimistes ont essayé de trouver le secret de la fabrication de l’or. Cette transmutation qu’ils désiraient réaliser est une image de la transformation de l’être humain en un être divin. C’est le but mystique de l’alchimie spirituelle. Ayons nos alambics et notre alchimie pour transformer la condition des femmes dans la société et dans l’Église.

L’or est image de perfection : perfection du corps et de l’âme réconciliés. L’or est symbole de fécondité, de chaleur, d’amour, de lumière. À cette période de l’année, nos jardins sont pleins de fruits et de légumes. La lumière n’est plus tout à fait celle de l’été, mais elle est encore plus belle, avec un peu plus d’humidité qui annonce l’automne.

L’objet du jour : la plume.

La fonction de la plume est liée aux rituels d’ascension céleste. Elle est associée aussi à la lune et représente la croissance de la végétation. C’est aussi un symbole de puissance aérienne qui se serait libérée des pesanteurs de ce monde. N’est-ce pas le cas de Marie ?

« Rayonnant d’une gloire unique

tu es élevée corps et âme.

La nature parvient en toi

au plus haut degré de beauté ». (1ère vêpres du 15 août)

L’animal symbolique : la chèvre.

En Inde, la chèvre est le symbole de la substance primordiale non manifestée, la mère du Monde. La chèvre apparaît dans toutes les traditions comme le symbole de la nourrice et de l’initiatrice, tant au sens physique que mystique du mot. En ce 15 août, nous considérons Marie comme notre mère et notre initiatrice, tant pour sa fécondité que pour son assomption.

Le mets à l’honneur : un plat de courge.

La courge est considérée, à cause de ses nombreux pépins, comme un symbole d’abondance et de fécondité. La courge est non seulement appréciée comme source de vie, mais aussi comme symbole de régénération… C’est pour les Taoïstes une nourriture d’immortalité. Elle est très bonne, préparée avec du basilic dont les feuilles auraient un pouvoir magique. En alchimie, elles symbolisent le feu qui va transformer les métaux.

Méditations suggérées :

Psaume 44,11-12 et 14

« Écoutez, Vierge, et regardez, prêtez l’oreille : le Roi est épris de votre beauté. Elle est toute splendeur la fille du Roi qui fait son entrée : ses vêtements sont tissés de l’or le plus fin ».

« Alléluia ! Alléluia ! Marie a été élevée aux cieux ; l’armée des anges est dans la joie ».

Livre de Judith 13, 22-25

« La Divinité, dans sa toute puissance, vous a bénie. Par vous, il a brisé nos ennemis. Ma fille, vous êtes bénie par la Divinité entre toutes les femmes de la terre.

Bénissons la Divinité qui a créé le ciel et la terre. Elle s’est servie de vous pour frapper à la tête le plus grand de nos ennemis. En ce jour, elle vous a donné une telle gloire que votre louange sera à jamais sur les lèvres des humains qui éternellement se souviendront de la puissance de la Divinité. Devant les souffrances et la détresse de votre race, vous n’avez pas regardé à votre vie, mais vous nous avez sauvés de la ruine sous le regard de la Divinité ».

4e Béatitude, L’autre Parole

« Malheureuses celles qui se taisent

pour avoir la paix

Car elles entretiennent l’oppression.

Heureuses les victimes du pouvoir patriarcal

qui trouvent, dans la violence qu’elles ressentent,

la force de bâtir la paix ».

La Toussaint : réconciliation de la Terre et du Ciel

La Toussaint c’est la fête de la communauté des vivants et des morts. Dans les pays anglo-saxons, c’est l’Halloween, une fête de défoulement et de joie. L’Église a choisi un modèle celtique en fixant cette fête qui remonte à la nuit des temps. Dans les civilisations agraires, les troupeaux entraient à l’étable puisque l’été était fini. Mais il restait à célébrer des rites pour tuer l’esprit du blé afin qu’il puisse y avoir une nouvelle germination l’année suivante…. Nous avons besoin de catharsis pour nous libérer de nos angoisses et de nos oppressions. Nous les dirons et nous les mimerons pour nous en libérer. Après avoir éteint les lumières, nous allumerons une petite lampe qui nous conduira jusqu’au grand éclairage de Noël. Nous pourrions lire : « Dans la gloire, les saintes et les saints exulteront ; elles et ils seront pleins de joie en leurs demeures ». (2e vêpres de la Toussaint)

La couleur du jour : le violet.

Le violet est une couleur d’équilibre et d’amour de la sagesse, sagesse qui a été trouvée par celles et ceux qui jouissent du repos éternel. Le violet évoque l’échange perpétuel qui existe entre le rouge chtonien et le bleu du ciel, la communauté des vivants et des saints. 1 est aussi la couleur du secret, de la transformation, de la réincarnation.

La pierre symbolique : le jade.

Le jade comme l’ambre est chargé d’énergie cosmique. Les Chinois croyaient que le jade empêchait la putréfaction du corps. La sonorité du jade est l’écho de celle qui règle l’harmonie entre le Ciel et la Terre.

L’objet du jour : la balance.

La balance, symbole de la justice et du jugement, est en harmonie avec notre quête de sens dans cette fête de la Toussaint. Chez les Grecs, la balance est représentée par la déesse Thémis, fille du Ciel et de la Terre, de la matière et de l’esprit, du visible et de l’invisible. C’est le destin de l’humanité de concilier ces deux pôles à partir de notre vie terrestre, le retour à l’unité se faisant à la résurrection.

L’animal symbolique : l’oie.

En Égypte et en Chine, l’oie était considérée comme la messagère entre le Ciel et la Terre.

Le mets à l’honneur : le vin.

Dans la Grèce ancienne, le vin se substituait au sang de Dionysos et figurait le breuvage d’immortalité. Il est symbole de joie et de tous les dons que la Divinité fait à l’humanité. Le Psaume 104,15 parie du « vin qui réjouit le coeur des humains ».

Le Christ a changé l’eau en vin à Cana et, à la dernière Cène, il dira en prenant la coupe de vin : « Ceci est mon sang, le sang de l’alliance. Faites ceci en mémoire de moi ». Le vin est donc une boisson d’immortalité. Le vin peut transformer ce qui est terrestre en quelque chose de spirituel et de libérateur, voire d’immortel.

L’Halloween prendra ce sens pour nous et nous la fêterons dans la convivialité avec des amis, des voisins en partageant le vin nouveau.

Méditations suggérées :

Luc 10, 38-42

« Comme ils faisaient route, Jésus entra dans un village et une femme nommée Marthe le reçut dans sa maison. Celle-ci avait une soeur appelée Marie qui, s’étant assise aux pieds du Seigneur, écoutait sa parole. Marthe, elle, était absorbée par les multiples soins de service. Intervenant, elle dit : « Seigneur, cela ne te fait rien que ma soeur me laisse servir toute seule. » Mais le Seigneur lui répondit : « Marthe, Marthe, tu te soucies et tu t’agites pour beaucoup de choses ; pourtant il en faut peu, une seule même. C’est Marie qui a choisi la meilleure part, elle ne lui sera pas enlevée ».

6e Béatitude, L’autre Parole

Heureuses celles qui, prenant conscience de leurs oppressions

se libèrent dans une parole de pardon.

Malheureuses celles pour qui

le pardon est démission.

Noël, fête de fécondité

Noël est une fête romaine d’origine orientale. Elle se rattache au mythe et au rituel de Dionysos ainsi qu’aux légendes sur la naissance de Mithra. On peut y voir aussi un souvenir de la naissance de Romulus et Rémus, nés d’une prêtresse vierge, la vestale Rhéa Sylvia.

À Rome, on fêtait les Saturnales, une fête de fécondité ainsi que les Opalia, cérémonies à la déesse Ops, une déesse-mère protectrice et vierge. Ce n’est qu’au IVe siècle que Rome fixa officiellement la date de Noël au 25 décembre pour donner un visage chrétien à la fête du jeune soleil, le solstice d’hiver. C’est aussi la fête de la lune naissante et montante.

Nous célébrerons donc des fêtes qui mettront à l’honneur les thèmes de fécondité, de joie, de lumière naissante, mais promise à un très grand avenir. Nous décorerons un arbre, symbole de la vie. L’association entre l’Arbre de vie et la manifestation divine est fréquente tant dans le culte de la Déesse-Mère que dans la tradition chrétienne. L’arbre est aussi un symbole de fertilité. Il symbolise la croissance d’une famille, d’un peuple, d’une communauté. La décoration sera accompagnée de chants exprimant la force de la vie.

La couleur du jour : le blanc.

Le blanc est la couleur du candidat, celui qui va changer de condition. Grâce à la naissance du Christ nous sommes des candidates du christianisme. C’est aussi la couleur de la révélation, de la transfiguration. C’est aussi souvent la couleur de la classe sacerdotale. Nous nous devons donc de la porter.

La matière précieuse du jour : l’argent.

L’argent appartient à la chaîne symbolique : lune-eau-principe féminin. Il est aussi symbole de pureté et dans la symbolique chrétienne, il représente la sagesse divine objet de notre quête.

L’objet du jour  : un berceau garni de voiles blancs.

Il est taillé dans le bois de vie et symbolise le sein maternel. Il correspond à notre besoin de protection, mais aussi à notre désir de libération, puisqu’il a la forme d’une barque, moyen d’évasion. Le berceau évoque le refuge et donc nous sécurisera pour la traversée de cette vie.

L’animal symbolique : la vache.

La vache est l’image de la terre nourricière mais aussi de la fertilité et du renouveau que nous célébrons en cette fête de Noël.

Le mets à l’honneur  : le lait et le fromage blanc.

Le lait est un breuvage de vie, premier breuvage et première nourriture. Il est symbole d’abondance, de fertilité mais aussi de connaissance. En effet, l’allaitement par la Mère divine permet la connaissance suprême. On dit de saint Bernard qu’il fut allaité par la Vierge et était devenu de la sorte frère adoptif du Christ. Comme d’autres symboles de la Vie et de la Connaissance, pris en tant que valeurs absolues, le lait est symbole lunaire et donc féminin. Rites : partage du lait, festivités autour de l’arbre.

Méditations suggérées :

Matthieu 1, 18-21

« Alors que Marie, mère de Jésus, n’était que fiancée à Joseph et qu’ils n’avaient pas encore habité ensemble, il se trouva qu’elle était devenue mère par l’action du Saint-Esprit. Joseph, son époux, qui était un homme juste, ne voulut pas la déconsidérer et résolut de rompre discrètement avec elle, y était dans cette intention, lorsque l’Ange du Seigneur lui apparut en songe et lui dit : « Joseph, fils de David, ne crains pas de prendre chez toi Marie, ton épouse, car la vie qu’elle porte en elle est le fruit de l’Esprit Saint. Elle enfantera un fils et tu l’appelleras Jésus ; car c’est lui qui sauvera son peuple de ses péchés ».

Lettre de Paul à son disciple Tite, 3

« Ami très cher,

Voici manifestée la bonté de la Divinité qui sauve toutes les femmes et tous les hommes. Elle nous apprend à rejeter l’impiété et les ambitions terrestres pour vivre ici-bas dans la sobriété, la justice et l’amour de la Divinité. Elle nous fait attendre ce bonheur que nous espérons : voir se manifester dans la gloire la divinité du Christ venu pour nous sauver. Il est venu nous libérer de tout péché et faire de nous un peuple qui soit son peuple, un peuple qui se consacre à faire le bien. C’est dans ce sens que tu dois parler et exhorter, c’est-à-dire dans la vie du Christ. »

2e Béatitude, L’autre Parole

« Heureuses les douces agressives habitées d’un vouloir-vivre.

Vous désarmez vos oppresseurs dans l’espérance de la réconciliation.

Malheureux vous qui semez la mort ;

Haine et violence vous récolterez. »

3e Béatitude, L’autre Parole

« Heureuses les femmes audacieusement éprises

de l’Évangile de Jésus-Christ

qui ont le courage d’y être fidèles plus

qu’en verbe ou en pensée, mais en actes véritablement.

Malheureuses celles qui dissocient les pensées,

le coeur et les actes

car elles ternissent la lumière de l’Évangile. »

Conclusion

II s’agit donc, pour nous, de nous souvenir du caractère sacré que la vie féminine a pu jouer dans les sociétés agraires et dans les rites de la végétation. Ce sont les religions de type patriarcal et monothéiste qui ont étouffé ces cultes. Elles ont de ce fait appauvri le sacré d’une partie importante de son sens.

Ce que je propose, c’est de renouveler les célébrations chrétiennes en y introduisant, selon des cultures et des génies propres, des rites et des symboles plus signifiants pour les femmes. Ce sont des suggestions destinées à éveiller un questionnement qui aboutirait à une nouvelle praxis. Je suis partie de notre vécu, de traditions millénaires, mais aussi des problèmes actuels.

Notre période connaît une accélération de l’histoire très rapide. Il est important de ne pas oublier le passé, mais aussi de s’adapter à de nouveaux besoins. Notre époque a valorisé le corps humain, par contre, notre société a engendré des problèmes de chômage, de dépression, de suicide. Nous avons donc besoin de moyens qui nous permettent d’exprimer notre angoisse face à la vie, mais aussi de trouver des lieux de convivialité pour nous aider à traverser les moments difficiles.

Nous sommes à la recherche de nouveaux rites plus proches de notre créativité de femme. Nous voudrions réconcilier le corps et l’esprit : réconciliation qui trouvera son sens final dans la résurrection avec le Christ.

L’Occident chrétien a vécu de valeurs centrées avant tout sur le rationnel. Nous sommes arrivées à un point de l’histoire où l’on sent naître le besoin de réconcilier la raison avec l’intuition, sans que l’une ou l’autre de ces approches aient la prédominance. I faut que l’Église du Christ retrouve le sens total de la vie en éliminant toute forme de manichéisme qui mettrait l’esprit du côté du bien et le corps du côté du mal. Et c’est dans cette perspective que nous cherchons dans la symbolique humaine un sens pour nos pratiques sacerdotales naissantes.

En effet, les femmes savent ce qui est merveilleux et inquiétant chez elles, c’est qu’elles peuvent donner la vie même à la Divinité.

Rien ne devrait arrêter les femmes dans leur quête actuelle puisqu’elles savent que le Christ n’a pas voulu les écarter de son sacerdoce, car elles se reconnaissent dans le message de vie et d’amour qu’il a apporté.

Autres références :

J. Chevalier, A. Gheerbrant, Dictionnaire des symboles, Paris, Laffont, 1982.

La revue L’autre Parole, les numéros 3, 13, 15, 19, 22, 23, 26, 27, 29, 32, 34, 35, 37, 40, 44, 45, 46, 48, 51, 55, 60, 61, 64, 68, 71, 72.

Diann Neu, « Nous nous appelons l’Église : l’expérience de liturgies féministes catholiques chrétiennes », Concilium 172, 1982, pp. 115-128.

Susan Starr Sered, Priestess, Mother, Sacred Sister : religions dominated by women, New York, Oxford University Press, 1994, 330 p., pp. 26-27.

Janet Walton, « Bénédiction ecclésiastique et féministe », Concilium 198, 1985, pp 95-103.

1 Source : Souffles de femmes, Lectures féministes de la religion, sous la direction de Monique Dumais et Marie-Andrée Roy, Éditions Paulines, 1989, article de Flore Dupriez, pp. 169-195.

2 L’autre Parole, « Nos Béatitudes », no 22, décembre 1983.

3 Mircea Eliade, Traité d’histoire des religions, Paris, Payot, 1975, p. 147.

4 Jean Markale, Le christianisme celtique, Paris, Imago, p. 209.

5 Jean Markale, Le christianisme celtique, Paris, Imago, p. 209.

6 Elisabeth Badinter, L’un est l’autre, Paris, Éditions Odile Jacob, 1986, p. 55.