DIEU LE PERE/DIEU LA MERE

DIEU LE PERE/DIEU LA MERE

(résumé du chapitre trois du livre d’Elaine Pagels, The Gnostic Gospels).

Notre tradition chrétienne, celle des juifs et celle d’Islam sont les seules où Dieu est dépeint uniquement avec les symboles masculin (roi, seigneur, maître, juge, père). Même si les théologiens de ces traditions essaient de nous dire aujourd’hui que Dieu n’est ni masculin ni féminin. Ce langage utilise est masculin et nous les enfants de la tradition chrétienne n’avons pas échappe à  l’impression que Dieu est masculin. Les recherches des fouilles archéologiques à Nag Hammadi et ailleurs nous démontrent qu’il n’a pas toujours été ainsi. On a découvert des évangiles gnostiques qui diffèrent de notre tradition. A l’intérieur de leur discours chrétien d’héritage juive ceux-ci utilisent un langage symbolique sexué (c’est-à-dire, masculin et féminin).

Dieu la Mère y est représentée de trois façons :

1.          Dieu la Mère d’un couple original. Dans ce cas soit que le divin est considéré comme « masculo-féminin », la grande puissance mâle­femelle, ou que le langage masculin et féminin est compris comme un langage méthaphorique sexué puisqu’en réalité le divin n’est ni l’un ni l’autre, ou que l’on décrive la source primaire en termes masculins ou féminins selon les caractéristiques à mettre en évidence. (p. 50-5l).

2.          Dieu la Mère l’Esprit Saint de la trinité : Père, Mère et Fils (cf. l’Apocryphe de Jean, l’Evangile aux Hébreux, l’Evangile de Thomas, et l’Evangile de Philippe). Jésus parle de « sa Mère, l’Esprit ». L’Evangile de Phi lippe va même jusqu’à dire qu’il est impossible que Marie ait conçu par l’Esprit car une femme ne conçoit pas d’une femme. D’après lui il faut comprendre la conception de Jésus de façon symbolique : « Est-il permis de souffler un mystère ? Le Père de toutes choses s1 est uni avec la Vierge qui est descendue ». (p. 51-53).

3.          Dieu la Mère, la Sagesse. Elle est la première créatrice universelle (cf. les passages bibliques où c’est par Elle que la terre a été créée. Pr 3, 19 ; Sg 8, 5 et 6 ; 9, 2 ; 14, 5 ; Jér 10, 12 ; 51, 15). Elle illumine les humains et leur donne la sagesse. (p. 53-56).

Ce langage symbolique sexué est absent de notre tradition et notre canon n’inclut aucun de ces évangiles dits « hérétiques  » •••• pourquoi ?

Les chrétiens gnostiques et les chrétiens orthodoxes avaient deux attitudes sexuelles très différentes. Chez les gnostiques Dieu était décrit dans les termes masculins et féminins avec une description de la nature humaine complémentaire à la vision de Dieu. Ils se referaient surtout au récit de la création en Gn 1 qui suggère une création d’égal à  égale ou une création androgyne. Ce principe d’égalité entre l’homme et la femme était traduit dans les structures sociales de leur communauté où les deux participaient au leadership. Chez les orthodoxes c’était très différent. Dieu était décrit dans les termes uniquement masculins. C’était le récit de Gn. 2 qui servait de point de référence (là où Eve est créée à  partir d’Adam et cela pour son épanouissement) et leurs structures sociales en étaient le reflet. A partir de la fin du deuxième siècle la domination de 1’homme sur la femme était acceptée comme l’ordre divin et ce non seulement dans la vie familiale, mais aussi dans le leadership social et ecclésial.

Pourtant au tout début les chrétiens orthodoxes étaient eux aussi assez ouverts aux femmes. Leur tradition entre autre, montrait Jésus parlant aux femmes sur la scène publique, ou bien encourageant Marthe à venir l’écouter plutôt que de remplir ses devoirs traditionnels de femme, ou encore accompagné de femmes aussi bien que d’hommes durant sa vie publique et cela jusqu’à la croix et après lorsqu’elles étaient parmi les témoins de sa résurrection. Paul cite « il n’y a plus l’homme et la femme ; car tous vous n’êtes qu’un en Jésus Christ » (Gal 3, 18) et dans une de ses lettres il salue Phébée une diaconesse qui semble être un de ses supérieurs dans le mouvement (Rm 16, 1 cf lTm 3, 11 aussi).

Pourquoi ce changement ? L’auteur mentionne deux explications possibles. La première serait que la montée des juifs hellénistes dans le mouvement chrétien l’influença dans le sens de la tradition juive (hypothèse de Johannes Leipoldt). L’autre serait que le mouvement de la religion chrétienne à cette époque d’un regroupement populaire à un regroupement plutôt de la classe moyenne laissa sa marque. Chez les pauvres, la lutte pour la survie nécessite l’utilisation de toute la main-d’œuvre disponible, en conséquence les femmes aussi bien que les hommes doivent travailler. Chez les riches c’est autrement.        Un exemple d’aujourd’hui serait celui du Moyen-Orient où seulement les femmes de la classe moyenne se voilent selon la tradition d’Islam, à cause de leur travail les femmes pauvres n’ont pas le loisir de faire de même. (hypothèse du professeur Norton Smith).

Notre seule certitude est que dans la polémique entre les chrétiens gnostiques et les chrétiens orthodoxes. les questions sur la féminité de Dieu et le rôle de la femme dans la société et dans l’Eglise étaient très débattues. Serait-ce possible qu’à la suite de cette polémique chacun ait durci ces positions et cela au détriment des femmes dans le cas de notre tradition, la tradition orthodoxe ?

L’auteur nous montre quelques exceptions à ces positions contradictoires. D’une part, les gnostiques n’étaient pas unanimes dans leurs affirmations sur la femme. Certains textes

parlent de la féminité avec mépris, néanmoins ce mépris était plus contre la sexualité que l’âme féminine et les autres exceptions ne sont que les reflets d’une société où l’homme avait un statut supérieur à celui de la femme. D’autre part, Clément d’Alexandrie (un des pères de notre Eglise qui écrit en 180) est l’exemple d’un orthodoxe qui parle de Dieu dans les termes masculins et féminins :

« La Parole est tout pour 1’enfant ; à la fois père et mère, professeur et infirmière … La nourriture est le lait du Père … et la Parole toute seule fournit à nous les enfants le lait d’amour, et il n’y a que ceux qui tètent à ce sein qui sont vraiment heureux. Pour cette raison chercher est appelé téter ; pour les enfants qui cherchent la Parole, les seins aimants du Père fournissent le lait ». (p. 67-68)

et lorsqu’il décrit la nature humaine il dit que :

« les hommes et les femmes partagent de façon égale dans la perfection, et les deux doivent recevoir la même instruction, la même discipline. Car le nom « humanité » est connu aux deux ; et pour nous « dans le Christ il n’y a ni mâle ni femelle » (p. 68).

Il exhorte les femmes à participer comme les hommes dans la communauté et offre une liste (unique dans la tradition chrétienne, de femmes qu’il admire à cause de leur réalisation (p. 68).

L’exemple de Clément cependant n’a pas été suivi.        Notre tradition a opté plutôt pour Tertullien selon qui :

« I1 n’est pas permis à une femme de parler dans l’Eglise, comme il lui est refusé d’enseigner, de baptiser, d’offrir (l’eucharistie), de prendre pour elle-même une part dans n’importe quel r6le masculin – et encore moins celui du prêtre » (p.  69).

Il est peut-être temps pour les femmes de faire un

retour aux sources !

The  Gnostic Gospels, Elaine Pagels, New York,

Random House, 1979.

Kate Bulman.