AU VENT DU LARGE Les Ursulines de Rimouski, 1970-2005

AU VENT DU LARGE Les Ursulines de Rimouski, 1970-2005

par Pierrette Chassé et Monique Dumais Québec, Anne Sigier, 2005, 305 p.

Danielle Guay, Vasthi

C’est avec un grand plaisir que j’ai plongé dans la lecture de AU VENT DU LARGE car ce livre a le mérite qu’on s’y attarde.   Non seulement il sort de l’anonymat un nombre impressionnant de religieuses qui chaque jour, à petit pas, poursuivent généreusement la mission d’éducation et d’amour d’Angèle Mérici, leur fondatrice mais aussi parce qu’il accorde une place particulière à la reconnaissance du travail des Ursulines de la province de Rimouski.

Réalisé dans la foulée du  100ième anniversaire de  l’arrivée des Ursulines en terre rimouskoise , Au vent du large fait suite à l’ouvrage de Caroline Tanguay, o.s.u.  À Rimouski, il était un monastère relatant l’œuvre accompli par ces femmes d’Église entre 1906 et 1970. C’est donc à partir des changements structuraux tant sur le plan de la société québécoise : déconfessionnalisation du système scolaire,  décléricalisation des institutions,  que sur celui de l’Église catholique avec le concile Vatican II – amorcés au cours de la décennie 60, que les auteures, Pierrette Chassé o.s.u et Monique Dumais o.s.u., nous convient à suivre le cheminement des Ursulines, de 1970 à aujourd’hui. Le document historique, dont les trois principales parties sont agrémentées par des photos et des témoignages, permet de considérer la grande capacité d’adaptation de ces religieuses aux transformations qui surviennent et de voir comment elles répondent aux besoins de la communauté, de l’Église et de la société.

D’entrée de jeu, les auteures nous amènent, comme elles le titrent  en première partie,  Au cœur du monde de l’éducation. Celui-ci, reconfiguré de A à Z à la suite du Rapport Parent, si on peut l’exprimer ainsi, bouleverse l’ensemble du système éducatif. Le monde religieux cède la responsabilité de l’éducation à l’État. Ainsi, les quatre monastères des Ursulines à Rimouski, Amqui, Matane et Gaspé, sont vendus au gouvernement québécois. Dans ce branle-bas du système éducatif devenu public, les Ursulines  vont enseigner, à titre de salariées, à l’extérieur des murs cléricaux. Dans l’ensemble, indiquent les auteures, « l’adaptation s’est faite avec une grande disponibilité d’esprit » (52). Les Ursulines, formées, éduquées et dotées de diverses compétences, investissent avec assurance et en nombre considérable tous les niveaux du système d’enseignement et ce, à plusieurs titres :  enseignantes au primaire, directrices, conseillères de commission scolaire, aides financières aux élèves, professeures universitaires et encore.

À la suite du Synode diocésain de Rimouski de 1969 à 1972,  la pastorale s’est défini davantage comme une mission plutôt que par des structures. Les auteures retracent alors la contribution des unes et des autres en pastorale au sein des paroisses et des diocèses. Que ce soit à  Rimouski, à Gaspé et les Îles, à Baie-Comeau, les Ursulines sont actives d’une façon soutenue. Elles  sont animatrices de pastorale dans les paroisses, dans les écoles, dans les hôpitaux,  dans le milieu carcéral ; elles sont engagées dans l’éducation de la foi aux adultes ; elles occupent des fonctions de secrétaires et d’agente de recherche et de développement au niveau des diocèses. En 1986, sœur Rita Gagné devient la première femme religieuse au Québec à assurer la coordination de la pastorale d’ensemble.

Mues par leur mission d’éducatrices, les Ursulines de Rimouski s’engagent également dans différentes activités touchant la spiritualité : sessions, retraites, accompagnement personnel par les Exercices spirituels ignatiens dans la vie courante. Certaines religieuses font figure marquante dans la création d’activités, la mise sur pied d’une maison de prière et d’un centre de spiritualité. À titre d’exemple, citons les Soirées Espérance initiées en 1986 par sœur Bernadette Bélanger.

La deuxième partie du document fait état de l’œuvre des Ursulines dans le milieu. Dès 1971, les religieuses s’y insèrent en petits groupes pour répondre aux besoins de la communauté. Des maisons de religieuses s’ouvrent à Pabos, à Baie-Comeau, à Hauterive, à Rimouski et  à Gaspé. Les sœurs se dotent de missions plus spécifiques telles que le soutien aux personnes en difficulté, l’aide à l’intégration sociale des personnes handicapées, l’accueil des familles monoparentales, le soutien aux mères célibataires. Les  besoins sont nombreux.  Ainsi, sous la responsabilité des religieuses, plusieurs organismes à but non lucratif voient le jour. Au fil du temps, certains traversent des périodes difficiles ou  ferment leur porte, comme ce fut le cas pour la maison de Pabos ; mais la plupart œuvrent encore aujourd’hui et fêtent même leur 20ième ou leur 25ième anniversaire. À Rimouski, L’Arbre de vie, dont les activités sont multiples, compte à ce jour une trentaine de bénévoles. L’ampleur des besoins fait naître de nouvelles œuvres : de  L’Arbre de vie a surgi L’Entraide le Rameau, incorporé par sœur Dolorès Dumont en 1989.   Le chapitre 7,  À voile déployée démontre que, depuis 1996, l’œuvre des Ursulines s’est assurée de la collaboration de divers partenaires pour mettre sur pied des organismes tels que : Aux Trois Mâts à Rimouski,  L’accueil Blanche-Goulet à Gaspé.

En dernière partie, les auteures se penchent sur la vie interne de la communauté religieuse. Nous découvrons alors les différents paliers  de vie : la Maison générale, la Maison provinciale, la Corporation des Ursulines. Nous apprenons encore, la petite histoire des diverses résidences de la province de Rimouski et nous faisons un survol des activités des Ursulines dans d’autres provinces et même outre-mer.  Il est intéressant de voir, dans les derniers chapitres, les transformations et les diverses adaptations que les religieuses ont eu à endosser en raison de la diminution du nombre de sœurs. Les auteures y démontrent, page après page, l’importance accordée à chaque membre dans la communauté : « Chaque sœur est reconnue comme participante à part entière dans la mission de la communauté. » (187). Elles s’impliquent dans divers comités d’actions tels que la cause de Marie de l’Incarnation, le comité pour  la promotion des femmes ou le comité de justice sociale. Sur le plan spirituel, elles se réservent un moment chaque année pour le ressourcement. Sur le plan culturel, il est intéressant de voir comment elles s’épanouissent dans la musique et les arts plastiques.

Par la suite, les auteures mettent en relief la question de la relève. Elles nous donnent un aperçu portant sur trois types d’expérience. La première qui porte sur la vie commune avec des jeunes filles, a été très enrichissant pour les religieuses et les jeunes filles qui y ont participé. Les deux autres concernent les personnes  associées avec les Ursulines et  le  Comité  Jeunesse encore en activité aujourd’hui. Elles valent la peine qu’on s’y arrête, ne serait-ce que pour la note d’espérance qu’elles dégagent. Le dernier chapitre touche la célébration. Nous observons alors que c’est avec foi, joie et amour que les Ursulines se mettent à la fête. Qu’il s’agisse de messes, de journées provinciales, de grands rassemblements ou de banquets, les Ursulines font action de grâce, se souviennent et célèbrent dans la foi et l’espérance. Ce livre, riche d’engagement spirituel et communautaire et d’expériences variées,  retiendra l’attention du lecteur et de la lectrice.

Bonne lecture !