DU VIETNAM AU Canada
Co zho Yhi-Tuonh, Pharmacienne
J’arrive à Montréal au mois d’août 1975. Partie de mon pays le 30 avril, j’ai mis plus de trois mois pour arriver à mon pays d’adoption : le Québec. Le temps est beau et chaud comme au Vietnam et un merveilleux sentiment de bonheur et de sécurité m’envahit : enfin, je suis dans un pays de paix et de liberté.
Élevée dans la tradition vietnamienne, imbibée de la doctrine de Confucius, la place de la femme est dans la famille et au foyer. Mais la guerre avec le service militaire obligatoire et à vie, a pris tous les hommes jeunes sous les armes. La femme vietnamienne, sans avoir à batailler, est considérée – de facto – comme chef de famille.
Tout est nouveau. Tout est à recommencer. Les premiers temps sont les plus difficiles : la longue recherche d’un travail, les longues nuits de veille pour repasser les examens… (tous les professionnels de la santé doivent, obligatoirement, repasser les examens de leur faculté pour exercer leur profession au Québec). Mais, ma petite famille est bien contente de se retrouver sous un même toit, de se relaxer en échangeant des idées sans peur du communiste. J’ai du plaisir à préparer de bons repas pour la famille mais j’aime beaucoup travailler avec les autres. C’est en confrontant les idées qu’on devient plus alerte, plus intelligent…
Je vais à la pagode « temple bouddhique » trois ou quatre fois durant l’année : au nouvel an et à quelques grandes fêtes religieuses. La pagode est un lieu de rencontre des personnes âgées qui font revivre des souvenirs de jeunesse. La religion bouddhique enseigne le renoncement à tout plaisir sensuel et matériel pour le bonheur spirituel. Elle convient surtout aux personnes à la retraite, aux gens de I’ âge d’or. Heureusement, la nouvelle orientation bouddhique essaie de mettre la religion à la portée des enfants en ouvrant sa porte pendant les vacances scolaires pour des leçons de Vietnamien, des camps de vacances… Un dimanche passé à la pagode à écouter les prières, les sermons des bonzes « prêtre bouddhiste » et à prendre le repas de midi avec la communauté religieuse, enlève le stress et les tensions.
Dans les familles chrétiennes, j’ai trouvé une largeur d’esprit, et un respect de la croyance d’autrui qui n’existaient pas auparavant. La religion chrétienne apporte une aide considérable à l’établissement des immigrants : une aide matérielle sous forme de vivres et de vêtements et un grand soutien dans la recherche du travail et l’intégration au milieu d’adoption.
Les femmes, par leur facilité d’adaptation au milieu, forment un trait d’union entre l’ancienne et la jeune génération. Elles comprennent les gens âgés avec leur vision mais aussi les jeunes avec leur aspiration. Elles peuvent trouver le bonheur dans une union avec un non vietnamien. Je crois fermement à la solidarité familiale qui est à la base d’une solide et forte nation. J’espère que les générations à venir gardent un sens intact de la famille avec la responsabilité d’aider au développement de chaque membre. Nous prenons bien soin de nos parents et de nos enfants. Nous avons tout ce qu’il faut pour bâtir un avenir heureux.