FORUM SOCIAL QUÉBÉCOIS (FSQ)

FORUM SOCIAL QUÉBÉCOIS (FSQ)

Carmina Tremblay, Phoebé

Chaque année à Davos, en Suisse, a lieu le Forum économique des « Grands de ce monde »(G8) dont l’idée est de préserver la domination du « profit avant tout ».

Au début du millénaire, pour contrer la force de ces Forums économiques et des injustices qui en découlent, des citoyens et citoyennes du monde entier (inspiré-e-s par le Brésilien Chico Whitaker)ont eu l’idée de mettre sur pied ce qu’ils et elles ont appelé des Forums sociaux.

En 2001, à Porto Alegre au Brésil, avait lieu le premier Forum social mondial. Depuis cette date, un Forum social mondial a eu lieu chaque année dont le dernier à Naïrobi (Kenya) en janvier 2007. Depuis, des Forums sociaux continentaux, nationaux, régionaux et locaux ont aussi eu lieu un peu partout à travers le monde. C’est dans cette mouvance que le Québec a tenu son premier Forum social québécois du 23 au 26 août 2007 à Montréal.

Plus de 5000 citoyennes et citoyens, dont 1/3 provenaient des régions, ont investi l’UQAM et le Parc Emilie-Gamelin (notons que plusieurs itinérant-e-s ont participé à certaines activités et se sont portés volontaires pour garder le site pendant la nuit).

5000 citoyennes et citoyens partageant en commun le rejet du néolibéralisme et de l’impérialisme et le désir de travailler à la construction d’un monde plus juste, plus solidaire et plus durable.

5000 citoyens et citoyennes ont participé et/ou ont présenté plus de 300 ateliers, conférences, exposés, 150 performances et expositions artistiques et culturelles, 70 kiosques, un festival du cinéma engagé avec plus de 50 films, courts métrages et documentaires, un forum des enfants. Le tout orchestré par un comité organisateur des plus efficaces et soutenu par plus de 300 bénévoles.

3 axes transversaux

– Quels projets de société pour le Québec de demain ?
– Résistances et alternatives au néolibéralisme : mobilisations locales et globales.
– Enjeux et stratégies féministes ont guidé la réflexion et les débats organisés autour de

8 axes thématiques :

– Droits humains et lutte pour l’égalité ; droits des peuples et diversité des identités.
– Environnement et écologie.
– Services publics et programmes sociaux : luttes contre la marchandisation du bien commun.
– Monde du travail, luttes syndicales, économie sociale et solidaire.
– Arts, cultures et pluralisme des moyens de communication.
– Participation citoyenne, démocratie et pouvoir populaire ; repenser le politique.
– Solidarité internationale et pacifisme, contre l’impérialisme et la guerre.
– Éthique, spiritualités et religions.

4 grandes conférences :

– Un Québec riche de toutes ses régions.
– Quel avenir pour nos services publics et nos ressources naturelles.
– Affirmer nos droits, enrichir notre démocratie.
– Québec-Amérique : quelles solidarités ?

Une assemblée des mouvements sociaux qui a débuté par la lecture d’ un «  Appel solidaire des mouvements sociaux : UniEs pour l’avenir du Québec et du monde. »

Cet appel  a été signé par 123 groupes (dont L’autre Parole).

Une marche manifestive qui a réuni plus de 2000 personnes.

Des  activités de création libre et de distribution de nourriture qui se sont tenues à la Place Émilie-Gamelin.

Tout ça et beaucoup plus… dont une trentaine de propositions qui ont émergées des différentes activités. Parmi ces propositions, notons que les participant-e-s à l’Assemblée des mouvements sociaux  ont convenu d’une semaine de mobilisation à la grandeur du Québec en janvier, qui culminera par une journée d’action le 26, dans le cadre de la journée mondiale d’action du Forum social mondial à laquelle participeront des milliers d’organisations à travers le monde. Notons aussi l’invitation lancée par l’Assemblée des Premières Nations du Québec pour qu’on les appuie dans leur démarche auprès du gouvernement du Canada pour que celui-ci signe la Déclaration sur les droits des peuples autochtones présentement débattue à l’ONU, l’appel lancé par l’Association pour une solidarité syndicale étudiante (ASSÉ) pour qu’on les appuie dans leur lutte pour la gratuité scolaire, l’annonce du lancement de la campagne Couvrir les besoins et sortir de la pauvreté, cet automne par le Collectif pour un Québec sans pauvreté, l’invitation lancée par le Collectif échec à la guerre pour une journée de mobilisation pour le retrait des troupes de l’Afghanistan le 27 octobre.

Évidemment je ne peux passer sous silence la participation de L’autre Parole à cet événement historique. Nous y avons offert un atelier de réécriture féministe qui a attiré une dizaine de personnes. Nous étions aussi présentes avec un Kiosque de promotion de la revue (qui nous a valu quelques abonnements et plusieurs ventes à l’unité en plus des cadeaux que nous avons offerts). Plusieurs membres ont aussi participé à cet événement à titre personnel.

Il est intéressant de noter que les citoyens et citoyennes font de plus en plus la différence entre les chrétiens et les chrétiennes qui ont une « spiritualité incarnée » et qui s’impliquent dans des actions citoyennes en vue de l’élimination des injustices et des violences de toutes sortes et « les autres »… et que les premiers/ères ont de plus en plus leur place avec les citoyens et citoyennes engagé-e-s dans des causes qui tiennent à cœur à tous ceux et toutes celles qui luttent pour un monde plus juste, plus solidaire et plus durable.

L’axe thématique « Éthique, spiritualités et religions » a d’ailleurs son origine  dans la collaboration entre les organisateurs du  Forum québécois théologie et solidarités (FQTS) qui s’est tenu en novembre 2006 et les organisateurs du FSQ.

Évidemment, à la fin d’un tel événement, beaucoup se demandent : « À quoi ça sert tout ça ? Est-ce qu’un Forum social peut changer le monde ? »

D’entrée de jeu, disons que ce n’est pas le Forum qui va changer le monde, ce sont ses participant-e-s. D’ailleurs, on a pu constater qu’ils et elles le changent déjà par leurs actions de lutte contre la violence et la logique marchande, de revendications et de mise en place de projets alternatifs qui favorisent la construction d’un monde plus juste basé sur la personne et ses besoins et non sur la logique marchande et « le profit avant tout ».

Le Forum est un espace de rassemblement, d’expression, de revendication qui stimule les échanges, permet les contacts, favorise la prise de parole, permet de se faire connaître et de connaître ce qui existe déjà un peu partout pour changer le monde. Il permet de se rendre compte que nous sommes beaucoup à vouloir changer le monde et que cet autre monde souhaité est déjà en marche à travers plein de projets, d’entreprises, de programmes… n’en déplaise à ceux et celles qui veulent nous faire croire « que nous n’avons pas le choix, que nous devons faire comme tout le monde, que les grands courants économiques sont intouchables ».

Bref, le Forum est un espace et aussi un processus qui maintient l’espoir et qui permet de constater qu’ « un autre monde est possible » et que bien plus, « il est déjà en marche » !