HYMNE À MON CORPS (No 52)

HYMNE À MON CORPS

Christine Lemaire- Bonnes Nouv’ailes

Mon corps est le lieu de mes réconciliations

Joie de le retrouver, de le redécouvrir, toujours, après chaque tempête !

Quand la vie m’en a un peu trop demandé, quand trop de pression m’amène à « décrocher » avant de m’effondrer, c’est par mes sens que la Vérité de la Vie se montre à moi.

Libérés, ils font la fête.

Alors, je cesse de me nourrir pour enfin goûter… et la Nature se fait plus généreuse.

Alors, Montréal m’offre un « sons et lumières » et les fleurs de mes violettes redeviennent fabuleuses de simplicité.

Alors, je prends le temps de pétrir un bon pain ; la force de mes bras participe au travail de la levure et, experte, ma main caresse cette belle fesse ronde, moelleuse et offerte.

Alors, la pluie joue sous mon balcon d’interminables sérénades pendant que Vivaldi ou Pierre Flynn me font l’amour.

Alors, l’odeur des oignons et de l’ail crépitant dans le beurre m’émeut.

Alors, le vent me caresse quand je marche et mes muscles obéissants me font leur sourire de reconnaissance.

Mon corps est lieu de communication authentique

II y a mes mains qui dansent devant moi sur la musique de mes paroles ; elles me soutiennent, m’aident à expliquer mon point de vue.

Il y a cette pression d’une main sur mon bras qui m’avoue qu’elle m’aime même si on ne me le dira jamais.

Il y a ce regard, si plein de tendresse et de promesses qu’il en devient insupportable et qu’il m’oblige à détourner les yeux.

Il y a cette voix douce et chaleureuse que je reconnais sans qu’elle se nomme et qui fait tressaillir mon coeur.

Il y a ce corps de l’autre que je célèbre dans l’amour.

Mon corps est Histoire

Tiens, cette ballade me rappelle mon premier amoureux.

Tiens, cette vieille lampe dans la maison de mes parents, dont la lumière est si douce et donne une couleur si tendre à ce fauteuil à fleurs, placé juste à côté ; c’est mon enfance qui est cachée derrière !

Tiens, ce châle noir que j’enroule frileusement autour de mes épaules, du mêmegeste sans doute que mon arrière-grand-mère à qui il a d’abord appartenu ; sa laineme pique la joue et mon imagination vagabonde.

Tiens, cette cicatrice redécouverte, qui me sourit, dès que je bouge la main gauche, et je me souviens… Mon corps est marqué, il me raconte son histoire.

Je suis VIVANTE

Et c’est mon corps qui me le dit, c’est mon corps qui me le prouve.

Ce corps, qui est corps de femme, me fait vénérer en même temps que craindre cet étrange pouvoir qu’il détient de transmettre la vie qui m’habite.

Je n’ai pas le contrôle total sur lui, même s’il m’appartient.

Il a ses rythmes et ses caprices.

Il a ses saisons et ses raisons.

J’ai beau vouloir quelquefois l’ignorer, sous prétexte que je suis être humain et donc « esprit supérieur », il me rattrapera toujours au tournant…

Et à la fin, c’est lui qui me fera disparaître.

Mais d’ici là, chaque fois que je me sentirai blessée dans mon âme, mes amours, mon intelligence ou mon orgueil, c’est par mon corps que je me ferai des forces nouvelles.

C’est par mon corps que je guérirai mes blessures.