L’EGLISE-INSTITUTION = L’EGLISE-COMMUNION
Ghislaine Villemur (Marie-Eve)
Institution et communion ; deux mots, deux idées, deux termes aussi peu semblables… le statique, le mouvement, concepts porteurs d’ennui ou de vie. Si bien qu’en abordant ce thème, je fus ramenée au sujet du dernier numéro de L’autre-Parole : « Nos contradictions ».
Quand je considère l’Église, je pense à l’autre royaume, à une vie meilleure, que l’amour apporte à la terre, Est-ce normal que l’Église-institution ne me rende pas le message du Christ plus proche, plus séduisant ? Le message s’embrouille-t-il à travers l’épaisseur de l’appareil ecclésial ? Le Christ n’est-il pas toujours la voie, la vérité, la vie ?
A part les vitraux, qu’y a-t-il de moins transparent que nos temples et nos presbytères ? Je suis assez honnête pour reconnaître que la bonne nouvelle doit encore habiter certaines congrégations, j’en fais l’expérience grâce à l’accueil des Dominicains de la Communauté chrétienne Saint-Albert-le-Grand… Ailleurs encore, aussi éloquents parce qu’inhabituels, les signes d’amitié, l’initiative qu’un couvent de religieuses prend, cette fois, envers d’autres femmes… du monde ! Ces dernières rencontres ont donné naissance à notre groupe Marie-Eve maintenant membre de L’autre Parole.
L’Église-institution, l’Église-communion… Qui m’en voudra d’entretenir plus d’attrait pour l’image que le dernier terme m’inspire ? Concrètement, le concept de l’institution projette l’image de l’homme, du pouvoir, de l’avoir ; tandis que le mot communion porte rien de moins que le message du Christ : amour et fraternité.
C’est en jonglant avec tout ce que contient de sens et de vie l’Eglise-communion que je peux trouver un visage aimable à sa structure extérieure. Les lois, les structures de l’institution sont aux croyantes, aux croyants, ce que sont les panneaux de circulation au voyageur, ou mieux, les officiers de la route qui nous offrent les cartes routières mais ne nous accompagnent pas. Ils sont même très souvent indifférents à nos projets L’Église-communion, elle, nous accompagne au long et au bout du chemin, c’est autour de la table que le, voyageur se sait accueilli, c’est là que l’Eucharistie se vit. C’est pour cela que l’Église se fait rassembleuse ; les lois, les interdits n’attirent pas. La sollicitude du Christ se manifeste, certes, dans chacune de nos vies personnelles mais nous attendrions davantage de ces témoins officiels… un peu comme nous, parents, avons une responsabilité plus spéciale vis-à-vis nos enfants qu’à l’endroit de tout autre. Est-ce que l’Église ne mérite pas comme nous ce reproche de Jésus : « Jérusalem ! Jérusalem ! combien de fois j’ai voulu rassembler vos enfants comme la poule rassemble ses petits et vous n’avez pas voulu ! » (Le, 13,31-35).
Je ne nie pas que l’Église ait besoin de se définir, de suggérer des modèles… la société civile dont je fais aussi partie comporte codes et lois ; seulement, je puis m’attendre à ce que cette Église témoigne de l’idéal qu’elle me propose, d’un comportement aussi édifiant que celui d’un monde simplement humain. Je souhaiterais qu’elle encourage à plus d’initiative que ne le fait la société civile, qui est déjà suffisamment stimulée dans ses objectifs d’ordre et de soumission.
Les médias, en nous faisant part du malaise de nos évêques face au contrôle de Rome à l’occasion du prochain Synode spécial, réveillent drôlement la frustration que chacune, chacun vit dans l’Église-institution ! Comment croire à une vie de foi qui soit celle de notre milieu, époque et culture quand on n’accorde à la démarche de nos évêques qu’une « voix consultative » ? Il sera question de réviser l’engagement plus grand des laïques : est-il un danger pour L’Église ou un signe des temps nouveaux ? Quel acte de foi devons-nous faire ?
Teilhard de Chardin se fait éclairant et réconfortant, toujours. Sensible à ses intuitions sur l’humanité, sur Dieu, sur l’univers, sur le royaume à venir, je souscris pleinement à sa vision… et recommande vivement le dernier ouvrage écrit en collaboration sur ce théologien-scientifique : Pierre Teilhard de Chardin-la victoire sur le non-sens dont voici quelques lignes : « L’amour entre les personnes – disait Teilhard – a une puissance de liaison intercentrique : par l’amour les personnes communiquent centre à centre et, loin de se dissoudre dans une unité différenciée, elles deviennent de plus en plus riches ». C’est pourquoi, ajoute l’auteur, le féminin » a un rôle si important dans la structure de l’univers. Selon Teilhard, c’est aux femmes surtout que revient la « tâche amorisante » dans la cosmogénèse (p. 11 ).
Et dans l’ecclésiogénèse » ?