LES CHAMPS DE LUTTE DES RELIGIEUSES,,,

LES CHAMPS DE LUTTE DES RELIGIEUSES,,,

en solidarité avec les femmes démunies

Les communautés religieuses féminines ont ouvert les premières des champs de lutte dans le domaine de 1’éducation, de la santé, des œuvres sociales. Des publications récentes en ont fait la preuve.

Dans la région de Montréal, ce fut le charisme particulier de certaines communautés féminines de s’occuper de femmes pauvres, abandonnées ou délinquantes : telles les soeurs du Bon Pasteur, les soeurs Grises, les soeurs de la Miséricorde. Comme « groupe » on travaille, le dévouement et l’amour des pauvres sont les leitmotiv. Avec l’urbanisation et l’essor démographique de la grande ville, les besoins grandissent… et les institutions grossissent, soutenues par le renfort de vocations nombreuses.

Depuis la révolution tranquille

La prise en charge par l’État des services sociaux, des services de santé et d’éducation a amené les communautés S réviser leurs champs d’action et leurs modalités d’engagement. Où étaient les nouveaux besoins auxquels l’État ne répondait pas ? On s’interrogea aussi sur l’avenir prophétique de la vie religieuse : comment inventer des projets nouveaux dans une ligne prophétique ? Le défi était de taille. Depuis 1975, les rangs du personnel jeune et disponible s’éclaircissent… A notre tour, nous devenons démunies, riches seulement de notre audace et de notre foi.

Malgré une situation humaine peu rassurante, des projets nouveaux naissent, épaulés par le renfort de personnel intercommunautaire parfois, surtout par l’appui financier des communautés religieuses-soeurs. Nouvel aiguillage cependant : d’une mentalité d’assistance, on tend S passer doucement vers une prise en charge des personnes par elles-mêmes. Mentionnons quelques initiatives :

INTER VAL – projet intercommunautaire de huit communautés religieuses féminines. Bénéficiaires : femmes et enfants violentés.

MAISON MARGUERITE – initiative des soeurs Grises de Montréal. Bénéficiaires : femmes sans domicile.

LES MAISONS DE L’ANCRE – initiative des soeurs du Bon Pasteur. Bénéficiaires : femmes en perte d’autonomie, suite à la Maison Marguerite.

BONJOUR, TOI – initiative des soeurs Grises. Centre de jour pour femmes seules et en difficulté.

LA PETITE MAISON – initiative des soeurs de la Miséricorde. Centre de jour pour mères célibataires en difficulté.

Religieuses en milieu populaire

Sensibilisées de plus en plus aux problèmes d’injustice que vivent les gens de classes populaires, les religieuses, par petites unités, se sont insérées dans les quartiers défavorisés pour « vivre avec » les gens. Leur présence en est une d’écoute. Leurs objectifs : permettre aux personnes de verbaliser leurs problèmes, de reconnaître qu’elles ne sont pas seules à vivre ces situations difficiles et qu’ensemble elles peuvent s’en sortir. Dans cette optique, des projets ont été mis sur pied visant à une prise en charge collective.

CEFAC (Centre d’éducation et de formation d’ateliers communautaires) – initiative d’une Petite sœur de l’Assomption. Cinq ateliers maintenant, dispersés dans les quartiers populaires de Montréal. Bénéficiaires : femmes dépendantes du Bien-être social, chargées de famille.

COUP DE POUCE – initiative d’une religieuse du Bon Conseil de Montréal. Centre de jour pour femmes du milieu. Activités de groupe. Une dame du milieu est maintenant responsable.

CENTRE D’ÉDUCATION POPULAIRE RENE GOUPIL – initiative de deux religieuses (C.N.D. et S.S.A.) et d’une jeune laïque. Une dame du milieu est maintenant responsable.

CENTRE AU PUITS – initiative d’une religieuse de Ste-Anne avec des compagnes. Centre de jour pour femmes seules. Activités à caractère instructif, récréatif, social, spirituel.

LA RÉSIDENCE DE L’ESPOIR – initiative d’une religieuse de Ste-Croix. Famille d’accueil pour handicapées psychologiques. Deux logements financés par le salaire d’un professeur, la pension d’une enseignante et celles des bénéficiaires.

RÉSIDENCE PRÉFONTAINE – initiative d’une soeur des SS. Noms-de-Jésus-et-de-Marie. Centre d’accueil pour jeunes filles en difficulté.

Quelques « franches-tireures »

Les religieuses qui travaillent au niveau des organismes populaires sont conscientes des situations d’oppression que vivent bien des gens : chômage, logement, abandon du conjoint, problèmes de pension alimentaire, etc.

Les Soeurs Auxiliatrices ont pris, comme objectif communautaire apostolique, un engagement pour la justice sociale. Avec des membres d’autres communautés, elles travaillent au sein d’organismes tels l’ADDS (Association pour la défense des droits sociaux), le Réseau d’entraide, le Mouvement de mobilisation contre la misère, un Comité inter-logement, des coopératives d’alimentation, etc.

Il faut avouer cependant qu’en général les religieuses ne sont pas encore à l’aise dans des organismes de pression. En arrière, elles sentent une autre pression… Le temps n’est pas loin encore où la femme, et particulièrement la religieuse, ne parlait pas en public, surtout ne devait pas contredire l’autorité, quelle qu’elle fût. Non, les religieuses ne sont pas suffisamment présentes sur le terrain des luttes de leurs consoeurs laïques. Il fallait peut-être qu’elles prennent d’abord la parole pour elles-mêmes, sur leur propre terrain.

Des prises de parole collectives

La Q.A.E.S.W.R. – The Québec Association of English Speaking Women Religious. Au printemps dernier, nous avions le plaisir de rencontrer sister Audrey Beauvais, S.S.A., présidente de la Q.A.E.S.W.R. Il s’agit d’une association de religieuses catholiques romaines anglophones, fondée le 22 janvier 1903 « pour un enrichissement mutuel et un ministère plus efficace ».

Des quatre objectifs de ses Constitutions, relevons les deux derniers :

. Encourager tout effort concret dans le but d’avoir une influence réelle sur les décisions de l’Église.

. Donner l’occasion à des femmes religieuses d’exprimer leurs opinions sur des questions de première importance pour l’Église et pour le monde.

A la dernière assemblée générale, le 27 octobre 1994, Mgr l’archevêque James W. Hayes d’Halifax était l’invité d’honneur. Le thème de sa causerie était des plus d’à-propos surtout après l’assemblée générale de la C.E.C.C. à Ottawa : « Quelques femmes d’entre nous nous ont bouleversés » (Luc 24, 22). Nous souhaitons garder contact avec l’Association et suivre leurs activités. A l’occasion, n’y aurait-il pas lieu d’entreprendre des actions communes ?

L’A.R.E.Q. – L’Association des religieuses enseignantes du Québec. Elle date de 1957. Ses premiers champs de lutte sont sur le plan professionnel. Se faire reconnaître comme égales à leurs confrères laïques avec toutes les femmes enseignantes et par le fait même avoir une rémunération égale. Les contrats ne seront plus une entente avec les communautés mais avec les individus.

La montée du syndicalisme amène les religieuses à s’intéresser, puis à adhérer au mouvement. La situation exige une évolution des mentalités, une initiation aux règles du jeu. À Montréal, l’Office diocésain des religieux organise des sessions de formation. L’A.R.E.Q. cherche à développer chez ses membres un dialogue ouvert avec les co-équipiers de travail, avec les jeunes, avec les parents et les directeurs d’écoles. Elle compte sur la solidarité de ses membres pour un engagement et un rôle actifs et responsables.

Des dossiers de pointe ont reçu une attention particulière ces dernières années : l’éducation sexuelle à l’école, l’école québécoise et son projet éducatif, la confessionnalité. Sur ces deux derniers sujets, un rapport a été présenté en Commission parlementaire. Tout dernièrement, un autre a été préparé et présenté au Ministère de l’éducation sur la condition enseignante.

L’A.R.E.Q. vise, de dire sa présidente, soeur Ghislaine Roquet, C.S.C. :

« à une présence féminine au niveau du pouvoir de décision et travaille à une conquête pacifique de son influence. »

Claire LANGLOIS groupe Marie-Eve