LIRE SUR LES FEMMES DANS LES JOURNAUX ET REVUES

LIRE SUR LES FEMMES DANS LES JOURNAUX ET REVUES

Monique Dumais, Houlda

Que serait-il advenu de la Bonne nouvelle du matin de Pâques si les médias avaient pris le relais des femmes venues au tombeau ? » C’est une question saisie au vol dans le Prions en Église d’avril 2010 (p. 170), soulevée par André Raymond, coordonnateur de l’émission Le jour du Seigneur.

Si les médias avaient mis de l’avant et propulsé les paroles et les actions de femmes, nous ne serions pas gardées à l’écart, rendues presque invisibles. Quand parle-t-on de nous dans les journaux et les revues ? J’ai trouvé trois points de repères :

Dans les revues spécialisées sur les femmes ;
Dans les dossiers sur les femmes du 8 mars ;
Lors de questions majeures : avortement, burqa.

Dans les revues spécialisées sur les femmes

Il existe une grande quantité de revues populaires publiées au Québec traitant de la santé, des soins de beauté, de la mode, etc., telles que Elle, Marie-France, Marie-Claire, Vita, Loulou, Votre beauté, Châtelaine, des revues de mode comme Vogue, et d’autres.

Par ailleurs, d’autres publications mensuelles poursuivent des recherches en profondeur.

Le magazine La Gazette des femmes existe depuis 30 ans au Québec. Il demeure l’outil de communication principal du Conseil du statut de la femme auprès de la population. Il a remporté plus d’une trentaine de prix, mentionnons : le prix Judith-Jasmin en 1988 et le Prix Robertine-Barry la même année et aussi le Prix Justitia 2005 (certificat de mérite) cogérés par l’Association du Barreau canadien pour  l’article « La charia au Canada » (nov.-déc. 2004) par Danielle Stanton et Grands prix 2007 de Magazines du Québec.

D’autres sont des instruments de recherche tels que Recherches féministes, une revue interdisciplinaire francophone d’études féministes, fondée en 1988, par Huguette Dagenais de l’Université Laval.

Différentes disciplines ont des revues spécifiques : la Revue Femmes et droit / Canadian Journal of Women and the Law, fondée en 1985, est le seul périodique canadien consacré entièrement à la publication et à la dissémination du savoir multi-disciplinaire dans le domaine en pleine croissance des études féministes juridiques ; Clio, une revue française sur les femmes et l’histoire ; Femmes du Monde Magazine, un Webzine pour toutes les femmes de différentes cultures, origines, classes sociales, aspect physiques, handicap, religions, etc. Un parcours sur Internet permet de faire des découvertes intéressantes.

Dans les dossiers sur les femmes du 8 mars et autres

La Journée internationale des femmes est une grande occasion pour les quotidiens et les hebdomadaires de fabriquer un dossier sur les femmes, de faire une démonstration des acquis du côté des droits des femmes. Espérons que ces dossiers sont parcourus. En 2010, les dossiers se sont concentrés sur le 10e anniversaire de la Marche mondiale des femmes et de ses quatre champs d’action.

D’autre part, le journal Le Devoir a une tradition de présenter dans son édition de Pâques, un Cahier spécial sur les religions. Cette année, Lucia Ferretti, historienne des religions, avait préparé un long article sur L’Église des femmes (Le Devoir, 3 et 4 avril 2010, A 6 et 7). Elle affirmait que « l’institution catholique vit une crise morale et une crise masculine ». Elle signalait que « l’Église a traversé bien des crises, mais qu’en général, ce fut grâce à l’engagement des femmes que l’Église s’est tirée de ses crises ». Et que dire de cette nouvelle crise morale créée par des mâles pédophiles dans une institution dominée par les hommes ?

Quel rôle les femmes peuvent-elles y jouer ? Le constat de Lucia Ferretti sur les femmes est éloquent : « Parce qu’elles ont depuis toujours été exclues du pouvoir dans l’Église, les femmes ont pu se concentrer sur le message de fraternité et d’espérance contenu dans l’Évangile. Ce sont bien souvent elles qui ont mis la main à la pâte, concrètement, pour assurer que ce message ne soit pas simplement des paroles, mais aussi des gestes concrets de vie, de liens sociaux, de justice, d’encouragement, de compassion. Ce sont souvent les femmes qui ont assuré la crédibilité de la pertinence de l’Église. En fait, elles ne sauvent pas l’Institution : elles sauvent le message en mettant l’accent sur l’engagement nécessaire pour l’actualiser. »

Et comme Lucia Ferretti connaît son histoire, elle cite des saintes comme Catherine de Sienne qui ramène l’unité dans la papauté, Angèle Mérici, Thérèse d’Avila et Louise Marillac qui apparaissent au cœur de la réforme catholique, Thérèse de Lisieux qui « contrebalance » la crise antimoderniste du début du siècle dernier. « Il faut parfois insister sur le fait que cela fait sans doute longtemps qu’on ne parlerait plus de l’Église si des femmes n’avaient pas accepté de lui donner leur énergie et leur compréhension de l’Évangile. » L’historienne souligne aussi le rôle des femmes lors de la fondation et des débuts de Montréal. Elle rapporte que depuis le début des années 1980, 25 communautés religieuses – parfois mixtes – sont apparues ou se sont implantées au Québec. Des communautés plus jeunes, différentes des plus anciennes qui sont encore présentes aux besoins sociaux actuels.

Est-ce la fin de l’institution Église ? Elle répond que non, s’appuyant sur le fait que l’être humain est un homo religiosus. « Or, le message chrétien est porteur d’une espérance si radicale qu’on peut penser qu’il survivra encore une fois intact aux multiples crises enchevêtrées qui secouent actuellement l’institution. » Cet article de Lucia Ferretti soulève les questions appropriées et apporte du souffle pour la suite des temps pour les femmes.

Lors de questions majeures pour les femmes

LE NIQAB DES SOLITUDES, c’était le grand titre de deux pages du journal Le Devoir des 20 et 21 mars 2010, p. A 8-9. Quand le voile des femmes est en jeu, les photos et les textes prennent beaucoup de place dans les médias écrits. Je me demande parfois pourquoi donne-t-on tant d’importance au voile des femmes sans jamais résoudre les questions qu’il pose. Et en plus, ce sont des cas très exceptionnels. Dans le cas de la Régie de l’assurance-maladie du Québec, il y a eu dix demandes d’accommodement pour des femmes portant le voile intégral alors qu’on est sept millions de Québécois et Québécoises. « Si on suit la logique, dit Lucie Lamarche, ça voudrait dire qu’à chaque épiphénomène, il faudrait baliser nos interventions ? »

Que symbolise le voile ? Une société où le patriarcat impose ses règles aux femmes en incluant l’Église qui ne manque pas de maintenir son contrôle sur les femmes. Crainte de leur pouvoir qui semble bien menaçant. Joseph Ratzinger, alors préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la foi, dans sa Lettre aux évêques  de l’Église catholique sur la collaboration de l’homme et de la femme dans l’Église et dans le monde, du 31 mai 2004, affirmait en nommant une tendance nouvelle pour affronter la question de la femme : « Une première tendance souligne fortement la condition de subordination de la femme, dans le but de susciter une attitude de contestation. La femme, pour être elle-même, s’érige en rival de l’homme. Aux abus de pouvoir, elle répond par une stratégie de recherche du pouvoir. » (no 2) Ah ! nous les hommes, le pouvoir est à nous, ne cherchez pas, femmes, à le conquérir !

L’avortement est un autre sujet de débat qui remplit les pages des journaux quand il est relancé dans le public. L’intervention du cardinal Marc Ouellet à un congrès de la Campagne Québec-Vie à Québec, en mai 2010, a soulevé maintes réactions et des commentaires étonnants s’étendant sur une longue échelle : d’un prétendu lynchage du cardinal à la demande d’une approche plus pastorale.

D’autres sujets comme la pauvreté des femmes, la solidarité des femmes ne font pas les manchettes ou si discrètement.

Rappelons en terminant les revues qui ont été mises sur pied par des féministes québécoises et qui se sont succédé à un rythme effarant : Québécoises deboutte ! 1972-1974, Les têtes de pioche  1976-1981, Des rires et des luttes de femmes 1978-1981, La vie en rose 1980-1987, sans oublier L’autre Parole depuis 1976, qui existe toujours et qui passera bientôt au virtuel.