LA VOIX DE NOTRE COLLECTIF

LA VOIX DE NOTRE COLLECTIF

Voici la première définition des orientations de l’autre Parole. On y décèle déjà les trois éléments fondamentaux actuels : collectif, féminisme et christianisme.

Venues des quatre coins du pays. (de trois plus exactement !) : Rimouski. Montréal. Sherbrooke), nous nous sommes rencontrées samedi. le 20 août, à Montréal. Au cours des quelques heures passées ensemble. nous avons parlé chacune du chemin parcouru pour notre libération, de notre rôle comme chrétiennes féministes engagées dons l’Église. de même que des orientations de notre feuillet l’autre Parole.

De cette journée de discussion, nous pouvons dégager quelques points saillants.

D’abord, la question de la solidarité des femmes : nous sommes toutes tributaires d’une formation et d’une Idéologie à domlna1te mâle. En particulier dons les domaines qui nous préoccupent, la théologie et la vie ecclésiale. on doit se rappeler qu’elles n’ont de féminin que le genre ! Notre allié. c’est le gros bon sens. c’est-à-dire que nous n’avons pas à tout gober : avec notre intelligence de femme nous avons à interroger les assisses actuelles de la théologie, les normes éthiques. etc. Et cela nous n’avons pas à le faire individuellement. car nous savons qu’en agissant seules nous n’arriverons à rien. C’est une parole commune. forte de notre solidarité qui doit jaillir dons le monde actuellement. Nous refusons de lutter isolément pour le changement de notre condition, nous avons choisi de lutter ensemble, collectivement. Nous voulons donc inviter les femmes à se regrouper, à former des petites équipes de travail afin d’analyser leurs conditions de vie de femmes et de lutter contre l’idéologie et la structure répressives. Nous demandons aux femmes chrétiennes qui désirent un revirement de situation dons l’Église, qui sont préoccupées par les questions de théologie et d’idéologie religieuse, de se joindre à nous.

Deuxièmement, nous avons tenu à discuter de l’avenir de L’autre Parole. Après un an d’existence. notre feuillet en est rendu à la parution de son quatrième numéro. Nous aurions de grandes ambitions pour L’autre Parole. mais nos faibles moyens actuellement nous limitent en ce sens. Nous demeurons donc un bulletin de liaison pour diffuser de l’information, faire connaître des expériences, publier des réflexions et des bibliographies. Nous souhaitons accroître la diffusion de notre feuillet et espérons ainsi la collaboration de nos sympathisantes et de nos sympathisants.

En dernier lieu. nous avons essayé de préciser nos orientations, nos partis pris.

Nous ne pouvons faire nôtre toute interprétation spiritualisante ou idéalisante de la condition des femmes dans l’Église. Là plus que Jamais, i1 est nécessaire de dévoiler la réalité dans toute sa crudité.

Nous refusons de nous laisser « amadouer » par les petites concessions que la hiérarchie voudra bien nous céder ; nous voulons légalité pleine et entière.

Nous croyons important d’avoir un regard critique sur l’ensemble du fonctionnement de l’Église Institutionnelle ; elle est une composante du régime établi et par là participe à la structure oppressive du monde capitaliste. Comme chrétiennes et féministes, nous avons pris option pour une société socialiste ; nous sommes de celles qui luttent pour la libération des femmes, mois nous sommes également avec ceux et celles qui, dans le quotidien de leur existence, connaissent l’injustice, la pauvreté, la misère, l’exploitation. Nous n’acceptons pas que les femmes soient des femmes courbées, nous nous refusons également que nos frères et soeurs continuent à être exploités par les pouvoirs politiques et économiques des sociétés capitalistes opprimantes. C’est pourquoi nos complicités vont avec ceux et celles qui travaillent concrètement à la libération des hommes et des femmes d’Ici et qui dénoncent ce qui, dans l’Église d’aujourd’hui, est contre­ témoignage et obstacle à la libération. Nous voulons être des femmes libres, libres avec nos frères, dons une Église et une société pour la liberté.

Monique Desrochers, Judith Dufour, Monique Dumas,

Béatrice Gôthscheck, Louise Mebnçon, Marie-Andrée Roy.

(No 4. octobre 1977.PP.l-3.)