SEPTEMBRE 2008 : AU PRIMAIRE Un nouveau programme dans les écoles du Québec

SEPTEMBRE 2008 : AU PRIMAIRE Un nouveau programme dans les écoles du Québec

Léona Deschamps, Houlda

Ayant enseigné quarante ans au primaire, soit jusqu’en 2001, les contenus des divers programmes scolaires avaient agrémenté mon parcours professionnel à cinq reprises.  C’est avec un malin plaisir et une curiosité de bon aloi que j’ai parcouru Éthique et culture religieuse (ECR) à intégrer dans le Programme de formation de l’école québécoise (MEQ 2001) au chapitre Domaine du développement personnel. Il remplacera ceux de l’Enseignement moral, de l’Enseignement moral et religieux (catholique et protestant).

Aboutissement d’un long processus du système scolaire québécois, le programme  Éthique et culture religieuse fut implanté, en septembre 2008, dans toutes les écoles qu’elles soient privées ou publiques.  Ce programme commun offert à tous les élèves répondra sûrement mieux aux orientations de la réforme en éducation. Quatre principes appuient les apprentissages poursuivis dans le programme ECR : on y vise des apprentissages continus et progressifs enracinés dans la réalité du jeune et dans la culture québécoise ainsi que des apprentissages respectueux de la liberté de conscience et de religion de nature à favoriser le vivre-ensemble québécois. Au primaire, sa finalité éducative consiste à permettre aux élèves de s’approprier des éléments essentiels de l’éthique, de la culture religieuse et du dialogue.  En voici les principaux éléments…

ÉTHIQUE

Dans le nouveau programme, les contenus de formation en éthique gravitent autour de 3 axes :

— la réflexion sur les valeurs et les prescriptions sociales

— l’appréciation de différentes visions du monde et de l’être humain

— la capacité à se situer de façon réfléchie au regard d’enjeux moraux ou éthiques au Québec.

Selon la présentation des contenus, il appert que chaque thème chapeaute ceux d’une année scolaire.

Au premier cycle du primaire

Sous le premier thème prescrit « Les besoins des êtres humains et d’autres êtres vivants » apparaissent les éléments de contenu suivants : Moi, un être vivant unique, des besoins communs et différents et la diversité des relations d’interdépendance.

À la suite du second thème « Des exigences de l’interdépendance entre les êtres humains et les autres êtres vivants » s’alignent les contenus : des responsabilités dans la famille et à l’école, des traitements appropriés et inappropriés ; des valeurs et des normes qui balisent l’agir dans la famille et à l’école ; des personnes ou des groupes témoignant d’un sens des responsabilités à l’égard des êtres vivants.

Au deuxième cycle du primaire

Lors de l’exploration du thème « Les relations interpersonnelles dans les groupes », sont proposés trois éléments de contenu : le développement de l’identité personnelle et les groupes d’appartenance ; les avantages et les inconvénients de la vie de groupe et la diversité des relations entre les membres d’un groupe.

Quatre éléments de contenu permettent l’approfondissement du second thème « Des exigences de la vie de groupe ».  Ce sont : des comportements et des attitudes qui contribuent ou nuisent à la vie de groupe ; des valeurs et des normes qui balisent la vie de groupe ; des conditions qui assurent ou non le bien-être personnel de chaque membre ; des rôles et des responsabilités des membres d’un groupe.

Au troisième cycle du primaire

Le thème « Des personnes membres de la société » comporte les éléments de contenu qui suivent : le jeune, un membre de la société ; des différences comme source d’enrichissement et de conflit dans la vie en société ; des préjugés, des généralisations et des stéréotypes.

Un second thème proposé « Des exigences de la vie en société » se développe à travers trois éléments de contenu : l’acceptable et l’inacceptable dans la société ; la gestion des tensions ou des conflits ; des valeurs, des normes et des responsabilités qui balisent la vie en société.

CULTURE RELIGIEUSE

Selon le nouveau programme, la culture religieuse concerne la connaissance du phénomène religieux à travers trois sphères de compréhension : celle du sens et de la portée de ses diverses expressions, ici et dans le monde ; celle d’une diversité de penser, d’être et d’agir issues de différents univers, religieux ou autres ; puis celle de l’importance du patrimoine religieux du Québec.

Au premier cycle du primaire

L’exploration du premier thème « Des célébrations en famille » s’effectue à travers la sensibilisation au fait que des fêtes et des rituels de naissance diversifiés soulignent de manières diverses des événements importants.

Lors du deuxième thème « Des récits marquants », des récits de diverses religions (des récits qui ont une grande influence et des récits de personnages importants) sont proposés aux élèves accompagnés des expressions du religieux qui s’y rattachent.

Au deuxième cycle du primaire

« Des pratiques religieuses en communauté » est le thème où l’on présente dans les éléments de contenu les principales caractéristiques des célébrations vécues (un temps, des lieux de culte, des objets et des symboles liés à des pratiques) ; des guides spirituels qui accompagnent les croyants ; des paroles et des écrits liés aux traditions religieuses ; des pratiques de prière et de méditation.

Pour explorer le thème « Des expressions du religieux dans l’environnement du jeune » sont considérés les éléments de contenus touchant l’environnement physique (monuments, édifices, toponymie) ; des expressions communautaires et culturelles (œuvres et événements) ; des représentations de l’origine du monde (symboles, images, récits, repères culturels).

Au troisième cycle du primaire

Un seul thème est étalé sur deux ans : « Les religions dans la société et dans le monde ».  Il est développé à travers les contenus suivants : les religions dans le monde, des fondateurs, des représentations du temps, des valeurs et des normes, des personnes modèles et leurs œuvres ainsi que des pratiques alimentaires et vestimentaires.

PRATIQUE  DU  DIALOGUE

En ECR, voici les indications pédagogiques proposées aux trois cycles du primaire en pratique du dialogue : formes du dialogue, élaboration d’un point de vue et interrogation d’un point de vue.

Les éléments de contenus pour la pratique sont progressifs selon l’âge des élèves.  Au premier cycle : la conversation, la discussion, la narration et la délibération constituent les éléments de la pratique du dialogue.  Au second cycle, on y ajoute la forme entrevue et au troisième le débat.

L’élaboration d’un point de vue comporte la description et la comparaison au premier cycle, avec l’ajout de la synthèse et de l’explication au second, puis la justification au troisième.

Quant à l’interrogation du point de vue, les élèves du premier cycle expérimentent pour ce faire les jugements de préférence et de prescription.  Au second cycle, apparaît l’ajout de l’expérience du jugement de réalité et au troisième celle du jugement de valeur.

Place et représentation des femmes dans le programme ?

Tout en décodant le programme, tout en portant la question, il me revenait en mémoire la vague de féminisation des textes née dans la commission scolaire des Phares, à Rimouski, à la suite de la parution du guide de madame Hélène Dumais Pour un genre à part entière en 1984.  Un document rédigé à la demande du Ministère de l’éducation du Québec.

Quand je revois l’énonciation des thèmes et des contenus du programme Éthique et culture religieuse, je dois sous-entendre la place et la représentation des femmes.  Elles existent probablement sans être nommées dans les quelques expressions du volet éthique (les être humains, les personnes, le nombre d’un groupe) de celui de la culture religieuse (des guides spirituels qui accompagnent les croyants et des personnes modèles et leurs œuvres).  Quant aux fondateurs de religions, on connaît bien le caractère patriarcal de ces diverses réalités.

Une recherche têtue m’a fait parcourir les exemples indicatifs associés aux thèmes et contenus prescriptifs.  Ce fut une maigre récolte avec les expressions : la fête des Mères, l’attribution du nom pour une fille, Esther, Aataensic, Ève, l’Annonciation, la pasteure et Mère Teresa.

Il convient d’admettre que le style de rédaction d’un programme ne peut être celui de la littérature féministe. Cependant, j’espère trouver l’impact de la croissance du féminisme dans la société québécoise à travers la rédaction des manuels qui seront créés pour les élèves.  De plus, j’escompte qu’à travers les pratiques du dialogue animées par les enseignants et les enseignantes se vivront des expériences langagières dans la foulée du Pour un genre à part entière.